03 septembre, 2014

L’Italie ouvre la porte à l’adoption homosexuelle

C’est une première en Italie : un tribunal pour enfants de Rome a accordé la semaine dernière à une femme au sein d’une relation homosexuelle d’adopter la fille de sa partenaire, selon la pratique de « l’adoption par le beau-parent ». La décision n’est que jurisprudentielle, et elle est de première instance, ce qui en théorie réduit sa portée. Mais c’est une telle révolution qu’en quelque sorte, le mal est fait. Les activistes homosexuels italiens avaient fait de « l’adoption par le beau-parent » une étape importante de leur marche vers les « pleins droits », et ils ont salué cette décision comme une victoire majeure, « une décision historique ».

Cette photo réalisée par Arturo Toscani au profit des
revendications du lobby gay a été détournée
par le mouvement de droite Fratelli d'Italia.
Toscani est furieux, et menace de poursuites.
L’Italie ne reconnaît pas le « mariage » des couples de même sexe, et n’autorise l’accès à la procréation médicalement assistée qu’aux couples légitimement mariés. La petite fille de cinq ans qui se retrouve aujourd’hui avec « deux mamans » a été conçue à partir d’une fécondation artificielle avec don de sperme anonyme, réalisée à l’étranger et donc en toute illégalité. Ni ce fait, ni la non reconnaissance des couples homosexuels en Italie, n’a empêché le magistrat de faire droit à la demande des jeunes femmes qui vivent ensemble à Rome depuis 2003 et qui se sont « mariées » à l’étranger.
Le juge a tenu compte de la « primauté absolue » des intérêts de l’enfant », au nom d’une loi de 2001 affirmant que celui-ci a intérêt à demeurer chez le parent « social » dans les cas de figure où la « relation émotionnelle et la cohabitation a été consolidée avec succès dans la durée » : la cour a estimé que cela devait s’apprécier indépendamment de « l’orientation sexuelle » du futur parent adoptif.
La présidente de l’association des « Parents arc-en-ciel » commente : « Qui peut nier l’intérêt suprême du mineur à être élevé par les deux géniteurs ? » « Géniteurs », c’est ainsi que les Italiens appellent ordinairement les parents : dans le contexte, l’absurdité de la déclaration n’en saute que mieux aux yeux.
Les associations homosexualistes parlent de la « fin d’un tabou » : enfin les lesbiennes ne seront plus séparées de leurs enfants, enfin elles ne croiront plus qu’elle ne peuvent pas procréer parce qu’elles aiment une femme. « Il ne manque qu’une loi, mais nous avons déjà gagné », exulte Flavio Romani, président d’Arcigay.
Et les uns et les autres mettent le Premier ministre Matteo Renzi d’agir. Celui-ci ne s’est pas exprimé publiquement, mais des membres de son parti, le PD, ont fait savoir qu’ils estimaient désormais nécessaire d’« aller de l’avant ». Le sous-secrétaire à la réformes constitutionnelle, Ivan Scalfarotto, demande que « le gouvernement et le parlement tiennent compte de la leçon » : « Il n’est pas juste d’élever des barrières idéologiques à propos d’une procédure qui relève de la civilisation et du bon sens », a-t-il déclaré, appelant les pouvoirs publics à agir « vite ».
Scalfarotto était l’un des deux vice-présidents du Parti démocrate de 2009 à 2013 et il est également militant de toutes les causes LGBT. C’est lui qui porte la loi anti-homophobie en Italie – une loi toujours en discussion devant le parlement, et fortement dénoncée pour ses aspects liberticides.
Conséquence logique de la décision de la semaine dernière : l’avocate des deux femmes, Maria Antonia Pili, présidente de l’association italienne pour la famille et les mineurs, a invité les « nombreux autres couples homosexuels à faire leur coming out », de manière à profiter de la nouvelle jurisprudence.
Le quotidien catholique L’Avvenire a dénoncé le jugement. Mgr Fabio Bruno Pighin, professeur de droit canonique à la Faculté Pie X de Venise, souligne dans un éditorial que l’enfant dans cette affaire est une « fille du désir », créée pour satisfaire les désirs des deux femmes. Il rappelle que les enfants ont le droit d’être élevés par un père et une mère dans le contexte de la famille naturelle : « On ne comprend pas comment cela peut se justifier au nom de l’intérêt suprême de l’enfant : l’enfant est privée d’une figure paternelle et se trouve au milieu de deux “mères”. »
Le professeur de philosophie du droit à l’université de Rome Tor Vergata Francesco d’Agostino, souligne quant à lui qu’un tribunal non élu n’a pas le droit de prendre décision d’une telle importance de manière unilatérale : « Le juge a entériné une situation que la loi italienne ne reconnaît pas. » Et ce « malgré l’arrivée prochaine devant le parlement de lois légalisant les unions de facto et peut-être même le mariage de même sexe » : pourquoi les juges n’ont-ils pas voulu attendre l’avis du « peuple » exprimé à travers les institutions législatives ? 

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