04 août, 2015
Gill Pharaoh, 75 ans, était
infirmière, et même infirmière de soins palliatifs. Elle vient
de mettre fin à sa vie dans une clinique liée à l’association « Lifecircle »
qui travaille avec l’établissement « Eternal SPIRIT » à Bâle.
Cette femme britannique, mère de deux enfants et vivant avec un compagnon,
n’était atteinte d’aucune maladie grave. Elle ne prenait aucun médicament et
était, au fond, en très bonne santé malgré quelques épisodes de mal au dos et
des acouphènes. La seule raison de sa mort choisie : elle ne voulait pas
se transformer en « vieille dame boitillante ». La vieillesse,
dit-elle encore, est « épouvantable ».
Le suicide assisté s’est déroulé
le 21 juillet dernier, sans doute après un parcours imposé par
l’association « Lifecircle » qui affirme « défendre la
vie » et qui à ce titre « ne propose pas d’aide au suicide »,
mais qui « par conséquent » (sic)
« travaille avec la Fondation Eternal SPIRIT pour aider les personnes dont
la souffrance est devenue insupportable, pour qu’elles puissent décider pour
elles-mêmes de leur vie et de leur mort, en choisissant la mort volontaire
assistée. »
Ladite Fondation n’assiste que les
membres encartés de LifeCircle et possède son propre organe d’évaluation des
demandes, parfois par le biais du recours à un médecin extérieur.
Gill Pharaoh, répétons-le, n’avait
pas d’autre « souffrance épouvantable » que la conscience de
régresser et la connaissance intime des difficultés de la vieillesse
fréquemment côtoyées au titre de son métier d’infirmière des soins palliatifs.
Elle qui avait écrit deux livres
sur les soins pour les personnes très âgées se sentait simplement en bout de
course et elle voulait « agir tant qu’elle le pouvait encore »,
persuadée que les choses ne pouvaient plus aller mieux. « J’ai tant d’amis
dont les partenaires sont évidemment un poids. Je sais qu’il ne faudrait pas le
dire mais j’ai dans la tête l’image mentale de ce qu’il suffit, à mon âge, de
se casser le col du fémur, après quoi on dégringole très vite », a-t-elle
expliqué dans une interview qu’il faut bien qualifier de militante, à quelques
semaines de la date programmée de son suicide.
Elle-même se sentait diminuer
« d’une manière presque imperceptible » en vieillissant. Elle ne
voulait en aucun cas imposer à ses enfants son éventuelle dépendance :
« Beaucoup de personnes âgées s’attendent à obtenir, voire exigent de
l’aide de la part de leurs enfants mais à mon avis il s’agit d’une manière de voir
à la fois très égoïste et déraisonnable. » « Si vous travaillez dans
une maison de soins et que vous êtes face à des personnes incontinentes, qui
jurent, qui déambulent dans les pièces et de servent de tout, c’est très
difficile. Ce n’est pas un travail auquel vous prenez plaisir »,
ajoutait-elle
D’où le voyage en Suisse. Elle
était accompagnée de son partenaire, John : la veille du suicide, ils se
sont promenés en ville, ont fait un bon repas sur les bords du Rhin. Le suicide
a eu lieu comme prévu, après quoi John a confirmé aux deux filles de Gill que
leur mère était morte.
Mme Pharaoh a elle-même organisé
la cérémonie « humaniste » qui aura lieu ce mois-ci.
La décision de Gill Pharaoh,
largement commentée par la presse britannique – et pas de manière très négative
– s’inscrit dans une mobilisation
médiatique en faveur du choix de mourir et de la rédaction de directives
anticipées (les fameux « testaments de vie »).
Un sondage
en ligne laisse penser que le discours soit efficace – même s’il faut tenir
compte des limites évidentes de ce genre de sondage « ouvert » où
chacun donne son avis, sans souci de pondérer les résultats. 44 % des
répondants affirment qu’ils n’envisageraient le suicide qu’en cas de « maladie
en phase terminale », mais un total de 26 % de personnes répondent « oui »
(16 %) ou « peut-être » à la question : « Envisageriez-vous
l’euthanasie en étant en bonne santé ? »
C’est à peine moins que le
pourcentage (27 %) de personnes qui n’envisageraient l’euthanasie en aucun
cas.
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