24 février, 2014

L'étrange “suicide assisté” d'une femme triste de vieillir

Oriella Cazzanello avait 85 ans, elle était riche, et elle avait été fort belle. Si belle, si attachée à son style de vie très libre – rapporte ce site suisse – qu'elle avait choisi de ne pas avoir d'enfant. Elle supportait mal de vieillir. Elle s'offrait volontiers, à l'occasion, une escapade dans un spa et ses proches ne se sont pas inquiétés lorsque, fin janvier, ils n'arrivaient pas à la joindre. Mais l'absence s'est prolongée et ils ont fini par avertir la police de la disparition de leur parente.

C'est mardi dernier que le notaire de la famille de la vieille dame a reçu, par la poste, l'urne contenant les cendres d'Oriella Cazzanello et un certificat de décès établi en Suisse. Et une lettre, émanant de la « clinique » Dignitas de Bâle où elle avait bénéficié du « suicide assisté ». La lettre expliquait que Mme Cazzanello, « en pleine possession de ses facultés mentales » aux termes d'une visite auprès d'un spécialiste effectuée auprès d'un spécialiste avant de demander le geste fatal, avait choisi de mourir parce qu'elle ne supportait ni la solitude, ni la perte de sa beauté physique.

Le « suicide assisté » avait été facturé 10 000 euros.

Histoire particulièrement macabre et désespérante, signe d'une perte du sens de la vie ?

C'est possible. Mais pour Dignitas, malgré tout, l'affaire est gênante puisque les motifs indiqués suggèrent que la mort y est « vendue » de manière bien légère, à l'heure où le discours officiel sur l'euthanasie voudrait y voir seulement une « solution » ultime quand rien d'autre ne peut plus soulager la personne qui la demande. Même si la loi Suisse permet à une personne dépressive de bénéficier du suicide assisté à condition d'avoir fait constater son état par deux experts. Il « n'est pas habituel », souligne l'autre association de suicide assisté suisse, Exit Suisse, que de tels certificats soient délivrés.

Exit Italia, de son côté, met en doute les motifs du suicide assisté avancés par la presse italienne : pour le Dr Emilio Coveri, son coordinateur, les médias italiens sont tous « asservis par le Vatican », prompts à « discréditer les associations offrant l'euthanasie ». « Mme Cazzanello, je la connaissais. Elle était dans un très mauvais état de santé, elle avait subi diverses opérations. Sa dépression était la conséquence de tous ces maux physiques. »

Mais en fait, l'histoire semble plus compliquée que cela. Si Dignitas – selon l'article cité plus haut – n'a pas voulu s'exprimer sur le cas de la vieille dame, il semblerait qu'une autre association ait été mêlée à l'affaire : Life Circle dans le canton de Bâle. La même association qui avait facilité le suicide assisté d'un magistrat italien, Pietro d'Amico, 62 ans, en certifiant qu'il souffrait d'une pathologie grave. L'autopsie réalisée à la demande de sa famille avait permis d'établir qu'il n'en était rien…

Mme Cazzanello, habitant à Arzignano, se serait donc approchée de Life Circle qui aujourd'hui, assure qu'en effet la vieille dame avait fait le choix de s'adresser à cette association avec un dossier attestant que son état était « particulièrement grave ».

Vrai ? Faux ? La famille d'Oriella Cazzanello, pour sa part, n'en croit rien. Elle a intenté une action en justice. « Parce qu'Oriella allait bien », assure son avocat, Claudia Longhi. « Elle était mélancolique, ça oui. Elle ne supportait pas de vieillir, surtout parce que jeune, elle était très belle. C'était une dame un peu spéciale, qui par choix avait décidé de ne pas avoir d'enfant et d'avoir des relations assez libres. Une personne très riche, habituée à être au centre des regards. Mais sa santé était bonne. J'ai moi-même parlé avec son médecin. Elle n'avait aucune maladie grave, ce que raconte M. Coveri est tout à fait faux. »

Seule, elle ne l'était pas non plus puisqu'elle habitait le même immeuble que son frère et des neveux : une quinzaine de proches au total, assure l'avocat.

Mais surgit un autre personnage. Celui qu'on a recherché en pensant que Mme Cazzanello avait été conseillée dans son choix d'euthanasie. Qui l'avait aidée à s'approcher d'Exit Italia. A organiser le voyage peut-être, voire qui l'avait conduite à Bâle. Claudia Longhi assure qu'un « cher ami » de Mme Casanelli a pu jouer ce rôle, que c'est lui qui a pris contact avec Exit Italia. « Selon ce qui est en train d'émerger lentement, il pourrait recevoir un bel héritage. Le conditionnel est de rigueur, mais l'affaire est tout sauf limpide », assure-t-elle.

Une enquête a été ouverte par le parquet d'Arzignano.

Et on se dit que si les médias italiens étaient vraiment « aux ordres du Vatican » pour discréditer les organismes d'aide à l'euthanasie et au suicide assisté, ils seraient passés dans cette affaire à côté d'accusations bien plus graves que celles qui ont fait la une des journaux la semaine dernière. Aujourd'hui, les journaux locaux d'Arzignano en sont d'ailleurs à expliquer que le fameux « cher ami » est recherché dans le cadre de l'enquête et que des bijoux ont disparu du domicile de la… victime.

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