Vincent Lambert : l’arrêt de mort n’est pas levé
Le Dr Kariger, conseiller général de la Marne |
Réunion tendue : on ne trahit pas de secret en révélant que les parents du jeune homme, qui s’y opposent, ont été froidement accueillis. Une nouvelle réunion est programmée pour le 16 novembre. L’objectif annoncé par le Dr Kariger est bien de respecter – cette fois ! – l’obligation de collégialité et d’information des proches de son patient, et même de rechercher un consensus. Mais il a bien souligné dans la presse qu’il prendra sa décision seul. La mort de Vincent sera-t-elle son macabre cadeau de Noël ? D’un autre côté, on imagine que les risques de poursuites pénales pour assassinat ou tentative d’assassinat sur personne vulnérable pourraient faire évoluer la situation.
L’affaire Vincent Lambert est marquée par une prise d’otage physique : le Dr Kariger refuse son transfert vers une unité de soins adapté à son état, qui est celui d’un tétraplégique en état de conscience minimale, alors qu’il est gardé dans le service de gérontologie-soins palliatifs du CHU de Reims. Pourtant, à 37 ans, il n’est ni vieux ni, surtout, en « fin de vie ». La nourriture solide qui lui est administrée par sonde, pour éviter un problème de « fausse route », le fait vivre comme n’importe lequel d’entre nous. Lui couper les vivres, c’est le condamner à mort.
La prise d’otage est aussi médiatique : le Dr Eric Kariger, au mépris de tout respect de la vie privée de « son » patient et de sa famille, se répand dans la presse pour justifier sa démarche. Non sans mensonges par omission et par action. Il laisse supposer que Vincent Lambert ne vit qu’au prix d’un acharnement thérapeutique, à telle enseigne que des personnes de bonne foi en sont persuadées. Il a déclaré avoir fait l’objet d’une plainte pour assassinat et d’une plainte devant le conseil de l’Ordre, toutes deux classées sans suite : il n’en est rien. Si poursuites il doit y avoir, elles restent à venir.
A la veille de la réunion du 27 septembre, le Dr Kariger expliquait à Marc-Olivier Fogiel sur RTL qu’il avait tenu compte notamment de « la souffrance familiale qu’il y avait autour » de Vincent pour se persuader que « cette alimentation et cette hydratation étaient devenues déraisonnables car elles n’avaient comme seule finalité que de prolonger la vie pour prolonger la vie ».
Voilà le point névralgique de cette affaire, du point de vue des pro-mort : il consiste à considérer qu’un être humain dont toutes les fonctions vitales sont en état de bon fonctionnement mais dont la qualité de vie est diminuée par un handicap physique consécutif à une grave lésion cérébrale serait en état de survie artificielle.
Pourtant Vincent ne survit pas « artificiellement ». C’est seulement le mode d’alimentation qui est en cause. L’alimentation et l’hydratation, dès lors qu’elles ne sont pas sans objet (sur un patient qui est en train de mourir) ou qu’elles n’augmentent pas inutilement la souffrance d’un malade, sont des soins ordinaires dus à chacun. Tout comme l’hygiène, les vêtements, le toit qu’il faut donner à Vincent parce qu’il ne peut plus se les assurer lui-même. Tiens, pourquoi ne pas attendre l’hiver et exposer Vincent dans la neige, au motif qu’il ne « veut » plus vivre ou plutôt au motif que sa qualité de vie est insuffisante ? Ce serait moralement équivalent. On lui a bien supprimé la kinésithérapie – au motif qu’elle coûte trop cher !
Le Dr Kariger a reconnu par ailleurs sur RTL qu’il parle aux patients comme Vincent, « même s’ils sont très pauci, pauci sensoriels (en fait : relationnels, ndlr), car il n’y a pas de retour objectivable de ce qu’ils entendent, de ce qu’ils comprennent, (…) jusqu’à preuve du contraire, on considère qu’il entend, on considère qu’il comprend, on considère qu’il peut intégrer tout ou partie de ce qu’on lui délivre ».
Pourtant son équipe a « objectivé » des manifestations d’inconfort de Vincent lors de certains soins pour en déduire une « suspicion » voire (quand Kariger parle aux médias) une « certitude » de son refus de vivre. Au Figaro, il a déclaré que Vincent « est capable d’un certain nombre de réponses réflexes mais n’a pas de capacité vraiment fiable à trouver un mode de communication ».
Voilà qui pose nombre de nouvelles questions – nous y reviendrons !
Cet article a paru dans Présent du mardi 1er octobre 2013.
1 commentaire:
S'il faut faire une autre neuvaine, j'en serais encore. Pouvez-vous faire passer le message au parents ?
Je ne dois pas être le seul.
Il faut qu'ils sachent qu'on ne les laisse pas seuls.
Enregistrer un commentaire