18 octobre, 2014
Une femme néerlandaise atteinte de
sclérose en plaques s’est fait euthanasier et a obtenu, par la même occasion,
de pouvoir donner ceux de ses organes encore « utilisables », vient
de révéler l’Algemeen Dagblad qui
donne la parole à sa fille, Rebecca, pour rendre compte de cette ultime
générosité. Sous le titre : « Mourir soi-même en sauvant cinq vies. »
Dicky Ringeling, de Zwijndrecht,
avait 61 ans. Avec son mari, elle travaillait à l’hôpital et voyait des
patients attendre les organes qui pourraient leur sauver la vie. Dévouée,
connue dans son quartier pour sa gentillesse – toujours prête à rendre service,
à consoler des parents qui avaient perdu un bébé, à aider un vieux monsieur
victime d’une chute, à être là le jour comme la nuit pour ceux qui avaient
besoin d’un coup de main – Dicky est partie comme elle a vécu.
C’est du moins ce que l’on nous
raconte. Car vu comme cela, qui aurait le cœur de dire que c’est une histoire
de mort et de mal qu’on nous présente là ? Comment oser mettre en cause la
« fierté » affichée par son mari, ses deux filles ?
Mme Ringeling était donc atteinte
d’une sclérose en plaque de forme agressive, à l’espérance de vie réduite. Le
diagnostic tombé, elle a décidé aussitôt qu’elle ne voulait pas souffrir de
manière « insupportable ». Inscrite comme donneuse d’organes, tout
comme son mari et ses deux filles qui s’étaient vu présenter le formulaire par
leur papa le jour de leur 18 ans – « Signe, là » – Dicky veut en
profiter pour que sa mort « ne serve pas à rien ». Aidée par ses deux
filles, elle a commencé son parcours du combattant.
Il y a en effet une contradiction
de procédure entre l’euthanasie et le prélèvement d’organes vitaux.
L’euthanasie suppose la visite d’un médecin spécialisé chargé d’examiner le
corps pour vérifier l’exécution conforme de la mise à mort. Et par ailleurs
l’euthanasie est souvent pratiquée sur des personnes dont les organes ne sont
plus d’une qualité suffisante pour la transplantation.
Dans le cas de Dicky Ringeling, il
a été décidé de faire venir le médecin spécialisé dès le début de la procédure
qui s’est déroulée dans un lit d’hôpital et non à la maison, comme c’est le
plus souvent le cas. Elle a passé trois semaines dans un service d’hospice
(soins palliatifs) où sa mort a été programmée, non sans avoir déterminé au
préalable quels organes seraient prélevés : reins, poumons, pancréas,
foie, mais aussi le cerveau qu’elle a donné à la recherche pour l’étude de la
sclérose en plaques.
Il paraît que tout s’est passé le
mieux possible. Mme Ringeling a plaisanté avec le médecin qui lui annonçait que
l’euthanasie aurait lieu dans une chambre sans ouverture à la lumière du
jour : « On pourrait s’arranger pour que ce soit un peu plus
joyeux ! » Une fois la mort constatée par le médecin spécialisé, les
prélèvements ont commencé dans les 5 minutes. Puis la lourde logistique de
l’acheminement des organes vers les malades receveurs, parés pour l’opération,
s’est mise en branle.
Sa fille Miranda raconte que Dicky
Ringeling a pris congé de tous ceux qui sont venus la voire une dernière fois
en disant « au revoir ». « Elle avait la sainte conviction qu’il
y a autre chose après cette vie. » « Nos adieux ont été beaux… »
Après un tel récit où la
générosité se le dispute à l’esprit de sacrifice, les trémolos à la
résignation, il importe tout de même de dire que de tels scénarios ne sont pas
admirables, que ce n’est pas une bonne idée d’ouvrir une discussion sur le don
d’organes – comme le suggère l’article – avec un patient qui a obtenu le feu
vert pour sa propre euthanasie. Il s’agit d’une forme subtile de
marchandisation du corps humain, d’appropriation de la vie qui ne nous
appartient pas, d’utilitarisme pur et dur.
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