« La foi, c’est la vie. Si vous n’avez pas la foi, vous n’êtes pas vivant. »
Myriam
Ibrahim, la jeune femme qui a échappé à une sentence de mort au Soudan où elle
avait été condamnée pour apostasie et adultère, vit désormais aux Etats-Unis
avec son mari, citoyen américain, et ses deux enfants. Sous la pression
internationale, une cour d’appel soudanaise s’est vue contrainte de lever la
condamnation.
Rappelons
qu’en France, c’est Chrétienté-Solidarité, sous l’impulsion de Bernard Antony,
qui a organisé une manifestation pour Myriam Ibrahim devant l’ambassade du
Soudan, le 26 mai. La seule, semble-t-il.
Myriam
Ibrahim a donné sa première interview à Megyn Kelly, de Fox News. L’entretien,
diffusé le 15 septembre, est superbe et émouvant. Il est visible ici.
Pour les non anglophones, je vous propose ici la traduction de leurs échanges. – J.S.
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Pour voir la vidéo, cliquez ici. |
— Myriam, c’est magnifique
de vous voir ici.
— Je suis heureuse d’être ici avec
vous.
— Vous avez été incarcérée
alors que vous étiez enceinte de plusieurs mois. Vous aviez déjà un petit
garçon d’un peu plus d’un an au moment de votre emprisonnement en janvier 2014.
À quoi pensiez-vous dans votre cellule de détenue ?
— La situation était difficile mais
j’étais sûre que Dieu resterait à mes côtés. Je ne me suis appuyée que sur ma
foi, sûre que Dieu serait là à n’importe quel moment et dans n’importe quelle
situation.
— Il n’a fallu que six
semaines pour qu’on vous déclare coupable d’apostasie et d’adultère. Vous
ont-ils donné la possibilité de renoncer à votre foi chrétienne?
On m’a donné trois jours. En outre, des
personnes de l’association des savants de l’islam sont venues me voir dans ma
cellule. C’étaient des imams qui m’ont récité des sourates du Coran. Je faisais
face à des pressions énormes.
— Mais vous avez refusé.
Vous étiez enceinte, vous aviez un petit garçon d’un an qui était avec vous
dans la cellule de prison : n’a-t-il pas été très difficile de rester
fidèle à votre foi ?
— J’avais pour moi la confiance en
Dieu : la foi était ma seule arme au cours de ces confrontations avec les
imams, car c’est ce que je crois…
— Pourquoi n’avez-vous pas
tout simplement dit ce qu’ils avaient envie d’entendre, pour sauver votre
vie ?
— Si je l’avais fait, cela aurait été
la même chose que de tout abandonner. Cela n’est pas possible parce que ce
n’est pas vrai. C’est mon droit de suivre la religion de mon choix. Je ne suis
pas la seule à avoir souffert d’une telle situation : il y a beaucoup de
Myriam au Soudan et à travers le monde. Il n’y a pas que moi, je ne suis pas la
seule.
— Pensiez-vous qu’ils vous
tueraient ?
— La foi, c’est la vie. Si vous n’avez
pas la foi, vous n’êtes pas vivant.
— Douze jours après que fut
prononcé la sentence de mort, vous avez donné naissance à Maya, en prison.
Dites-nous dans quelles conditions cela s’est passé.
— Maya est née dans des circonstances difficiles.
Je devais accoucher à l’hôpital mais ma demande a été rejetée. A l’heure où je
devais donner naissance ils ont refusé d’enlever les chaînes de mes chevilles
et j’ai dû accoucher entravée. Ce fut difficile.
— Quel noir moment cela a
dû être. Vous vous trouvez dans cette prison Soudanaise, vous tenez votre
nouveau-né dans vos bras, votre petit garçon est là près de vous, vous savez
que vous êtes condamnée à mort. Comment avez-vous réussi à faire face?
— C’était une situation très difficile
mais j’avais ma foi en Dieu. Je savais qu’Il m’aiderait, qu’Il savait que
j’étais victime d’une injustice. C’est mon droit de pratiquer la religion de
mon choix.
— Comment voyez-vous ce que
le gouvernement des États-Unis a fait pour vous?
— Au départ avant mon incarcération
Daniel et moi sommes allés au consulat des États-Unis. Le consul a refusé de
nous parler et d’entendre les détails de l’affaire. Cette femme a refusé de
s’occuper de nous et nous a dit d’aller voir auprès des Nations unies.
Cependant l’ambassadeur Jerry Lanier m’a soutenue et son soutien a vraiment
changé ma vie.
— Finalement sous la
pression internationale une cour d’appel vous a libérée. Quel effet vous a fait
cette nouvelle?
— J’ai ri, j’ai pleuré, j’étais très
heureuse.
— A l’aéroport ils ont
essayé de vous empêcher de quitter le Soudan mais pour finir vous y êtes
parvenue. Vous avez fait route pour l’Italie en compagnie du ministre délégué
des affaires étrangères, qui à quelques minutes de l’atterrissage à Rome a
envoyé un message : « Mission accomplie. » Puis vous avez
rencontré le pape. Cela a du être surréaliste.
— J’étais très heureuse. Je n’ai aucun
problème avec personne. Je n’ai commis aucun crime. La seule chose dont je sois
coupable, c’est d’avoir voulu vivre ma vie conformément à mes choix.
— Avez-vous été triste de
quitter le Soudan, malgré tout?
— Oui, cela était triste car c’est le
pays où je suis né. Mon peuple, mes amis, mes voisins sont tous là-bas, et ma
vie est profondément enracinée au Soudan. Malgré toutes les souffrances, et
toutes les circonstances difficiles – on s’y habitue.
— Parlons de l’islam. Le
Soudan est le théâtre régulier de persécutions envers les chrétiens. Elles
n’ont rien d’inhabituel. 88 % des filles subissent des mutilations génitales.
Quelle est selon vous la dangerosité de l’islam radical?
— Comme je l’ai dit, j’ai mis ma vie
dans la balance pour les femmes du Soudan. J’étais très près d’elles et je
ressentais leurs souffrances. J’ai partagé avec elles les conditions difficiles
de la prison et de la vie en général. En ce qui concerne la situation des
chrétiens, c’est un fait bien connu que leur vie est difficile, qu’ils sont
persécutés, traités avec dureté. Ils ont peur de se dire chrétiens par crainte
de la persécution. Parfois des chrétiens qui se trouvent en prison en raison de
difficultés financières s’entendent dire que le gouvernement remboursera leurs
dettes s’ils se convertissent à l’Islam. Je n’ai jamais été musulmane. J’ai
toujours été chrétienne. Si vous êtes chrétien et que vous vous convertissez à
l’islam, cela deviendra difficile de le quitter : si vous le faites vous
encourrez la peine de mort.
— Vous vivez désormais aux
États-Unis, dans le New Hampshire. Comment cela se passe-t-il?
— Pour l’instant je n’ai pas encore une
vie stable. Mais c’est mieux que la prison.
— Merci ! (Rires).
Avez-vous encore le sentiment d’être en danger ?
— Oui.
— Comment cela ?
— Parce que j’ai à l’esprit une image
très vive de la situation au Soudan.
— Et comment vont vos
enfants ici ?
— Mes enfants sont très heureux d’être
avec leur père, ensemble, comme une famille.
— Comment voyez-vous
l’avenir, Myriam ?
— J’aimerais aider les gens au Soudan,
en Soudan, spécialement les femmes et les enfants ; j’aimerais promouvoir la
liberté de la religion.
— Et à ceux qui vous considèrent comme
une héroïne pour les chrétiens ? Que leur dites-vous?
— Je leur dis: merci pour votre soutien
et pour vos prières. Mais j’ai toujours besoin de soutien. J’ai besoin de
prières. J’ai besoin du soutien des autres.
— Et vous les aurez. Je vous souhaite
tout ce qu’il y a de mieux pour vous et votre famille.
— (Avec un radieux sourire.) Merci. Merci beaucoup.
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