14 septembre, 2014

Bordeaux : un mort par inversion de seringues. Voulaient-ils tuer quelqu'un ?

La presse révèle qu'un patient de 61 ans est mort mercredi dernier dans un hôpital de Bordeaux à la suite d'une inversion accidentelle de seringues, « après avoir reçu en intraveineuse une dose de chlorure de potassium au lieu de l'injection de corticoïdes prescrite ». Une information pour homicide involontaire a été ouverte. Il s'agit clairement d'une « erreur d'administration médicamenteuse », précisé le communiqué de l'Institut Bergonié, spécialisé en oncologie. Les emballages des deux seringues étaient étiquetés, et non les seringues elles-mêmes, a indiqué Marie-Madeleine Alliot, procureur de la République de Bordeaux.

Le patient était hospitalisé dans une unité de soins palliatifs de l'Institut Bergonié.

On sait d'ores et déjà que la seringue de chlorure de potassium était en réalité destinée à un patient se trouvant dans une autre chambre.

Et là on se pose évidemment des questions. Dans cet établissement qui accueille des malades du cancer, y compris en soins palliatifs, injecterait-on volontairement des doses létales de chlorure de potassium comme celle administrée par erreur au malade décédé mercredi ? Une euthanasie était-elle programmée, mais s'est on simplement trompé de victime ?

L'administration du chlorure de potassium n'est pas forcément destinée à tuer le patient : elle a au contraire généralement pour objet de pallier un manque de potassium et, même s'il s'agit d'un médicament « à haut risque », son usage est répertorié. Mais uniquement sous forme diluée – la dilution devant être réalisée par du personnel formé – par perfusion en intraveineuse, avec une durée minimale de pose, et sous contrôle précis, deux personnes devant intervenir en principe pour vérifier l'ampoule initiale ayant servi à la dilution et l'étiquetage, la concentration et la vitesse de perfusion (directives de l'ARS en Ile-de-France).

Les accidents par confusion de produit sont rares mais se comptent tout de même par dizaines dans le monde, raison pour laquelle les procédures ont été mises en place pour que ces morts « évitables » ne se reproduisent plus – tardivement en France comme le montre cet article. Une circulaire du 14 février 2012 attire l'attention des établissements de santé sur la gestion de ces risques.

Il semble en tout cas que l'ampoule de chlorure de potassium (KCl) soit clairement identifiable : elle n'existe que dans deux dosages, un pour adulte, un pour enfant, et présente une apparence non moins reconnaissable :


On imagine mal que la jeune infirmière étudiante en troisième année qui a administré la piqûre mortelle en présence de l'infirmière confirmée qui la surveillait ait vu cette ampoule.

Elle n'aurait donc vu que la seringue. Avec un produit dilué ? Non dilué ?

S'agissait-il de deux seringues à intraveineuse ? Sauf erreur, on n'injecte pourtant pas du KCl directement en intraveineuse…

Les seringues à intraveineuse sont-elles différentes des autres ? Un étudiant infirmier est-il habilité à faire des injections en intraveineuse ?

Autant de questions qui se posent. Peut-être des infirmiers pourraient-ils nous éclairer…

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© leblogdejeannesmits



1 commentaire:

Anonyme a dit…

Bonjour,

J'ai lu votre article et je me permet de répondre étant infirmière ayant exercé 5ans dont 3ans en cancérologie/soins palliatifs.
L'erreur est très grave et surtout rare car l'administration de n'importe quel produit en IV demande toujours un étiquetage minutieux de la seringue, une vérification de la prescription avant administration. Un élève de Troisième année peut administrer un produit seul, si son infirmier référent considère qu'il en est capable mais toujours sous la responsabilité de l'infirmier diplômé.
Vous posez la question des différences de seringue selon les produits; En fait les produits sont dans des ampoules différentes mais après préparation et dilution( ou pas) on les met dans des seringues toutes identiques, stérilisées. La seule façon de les reconnaître est l'étiquette faite par l'infirmier qui fait la préparation, qui se doit de noter de façon lisible le nom du produit, sa dilution, heure de dispensation et la chambre du malade .
Pour distinguer une seringue IV d'une autre seringue (S/Cutanée, Intra musculaire), seul la couleur de l'aiguille diffère.
S'il n'y avait aucun étiquetage, il est donc facile de se tromper!

Pour moi une des seules raison valable pour expliquer une telle erreur, pourrait être le rythme surchargé de ces services, le manque de personnel, la fatigue qui entraîne l'inattention...
Mais en aucun cas il n'est possible de laisser "trainer " des seringues "vierges" d'étiquetage mais surtout de les administrer!
D'autre part, c'est normalement le soignant qui prépare l'injection qui l'injecte et nom pas un collègue.

Voilà quelques informations qui n'enlèvent cependant pas le doute sur l'hypothèse de pratiques douteuses dans certains services.

Cordialement.

C V

 
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