Argentine : une femme qui se dit violée a droit à l'avortement
La Province de Cordoba en Argentine a fait appel du jugement d'un tribunal local qui a exigé un constat médical de viol pour une femme qui demandait une « interruption volontaire de grossesse ». Les autorités publiques cherchent ainsi à rendre applicable sur leur territoire l'arrêt de la Cour suprême de Buenos Aires fixant en mars par voie jurisprudentielle les conditions de dépénalisation de l'avortement. Cet arrêt affirmait l'accès automatique à l'avortement, sans jugement préalable, pour les trois cas prévus par l'article 68 du code pénal argentin, et écartait a priori toute obligation d'apporter la preuve du viol qui est l'un d'eux.
La Cour suprême affirmait qu'un déclaration sous serment, de la part de la femme se disant violée, était suffisante, sans qu'il soit nécessaire ni de procéder à un examen médical ni même qu'une plainte ait été déposée. Lorsqu'un guide d'application avait été publié, dans la foulée, dans la province de Cordoba par les autorités sanitaires, une organisation catholique, Portal de Belen, avait introduit une action pour empêcher sa mise en application et pour faire constater l'inconstitutionnalité de l'avortement dépénalisé.
Le juge Federico Ossola l'avait partiellement déboutée, jugeant que l'avortement dépénalisé n'était pas contraire à la constitution fédérale, y compris en cas de viol. Mais sur ce dernier point, il avait jugé « insuffisante » la déclaration sous serment pour « tenir pour vérifiée l'existence du viol », ajoutant la condition du constat du viol pour qu'une femme puisse se faire avorter. Dans le même temps, le juge avait suspendu l'application du guide d'application à propos des avortements non punissables.
La Province cherche à faire reconnaître la « nullité absolue » de ce jugement afin de lever au plus vite la suspension qui à l'heure actuelle touche les hôpitaux publics provinciaux. Dans le réseau national des hôpitaux et cliniques les critères de la Cour suprême sont déjà appliqués, y compris à Cordoba ; et dans les cliniques privées, liberté est laissée aux responsables.
Le discours est des plus convenus : exiger, comme l'a fait le juge Ossola, de la femme qu'elle se soumette à l'avis d'un comité interdisciplinaire pour faire constater la réalité du viol qu'elle allègue, c'est la « revictimiser », assure un porte-parole de la Province. Celle-ci accuse également le juge d'avoir outrepassé sa compétence en cherchant à légiférer – comme si la Cour suprême n'en avait pas fait autant. Elle pointe également le refus du juge Ossola de suivre la jurisprudence et le fondement « logico-légal » de celle-ci.
De telles bases logico-légales pourraient bien faire augmenter fortement le nombre des viols en Argentine, sans que l'on retrouve jamais ni les victimes, ni les agresseurs présumés devant la justice…
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