14 septembre, 2011

Argentine : l'enfant du bonheur

Cette histoire n'est pas politiquement correcte. Elle nous vient d'Argentine, de Rivadavia où encore l'année dernière les médias se mobilisaient pour faire pleurer à propos d'une adolescente violée par son beau-père et qui devait avoir « droit » à l'avortement. Cette fois-ci, le journal régional Diario de Cuyo a repris non sans une émotion un peu étonnée un fait divers qui dit tout l'inverse. L'histoire d'une jeune fille souffrant d'un retard mental qui a donné la vie, il y a moins d'un mois, à un joli garçon pesant 3 kilos, en parfaite santé, et qui est la coqueluche de son quartier.

« Il dégage un magnétisme particulier. Tous, famille et voisins, sourient quand ils le voient, tous veulent le cajoler, tous semblent reconnaissants de sa présence », constate le journaliste, Eduardo Manrique.

Or logiquement – dans l'état actuel de la loi argentine que les médias jugent pas assez libérale – ce bébé devrait être mort. Eliminé. Avorté.

Car il est le fruit d'un viol, et d'un viol sur une femme souffrant d'un retard mental, incapable d'avoir des relations sexuelles consenties. Cas d'école pour le droit argentin : le « pire », celui où l'avortement dépénalisé est quasiment concédé d'office.

Mais quand la grossesse de la jeune maman – 23 ans – est devenue apparente, elle était déjà enceinte de 5 mois. C'est sa mère qui a constaté que son ventre s'arrondissait. Elle lui demanda : « Qui t'a fait ça ? » La jeune femme répondit aussitôt que c'était son beau-frère, le mari de sa sœur qu'elle allait voir régulièrement pour l'aider, car malgré son handicap, « elle sait les choses de la maison ».

Atterrée par le viol mais sans haine contre ce nouveau petit être qui était là, Hilda, grand-mère du tout-petit, qui a eu elle-même six autres enfants – a décidé que si les siens avaient à souffrir de la pauvreté dans leur quartier déshérité de Rivadavia, ce nouveau bébé ne manquerait jamais de rien. De toute façon, les voisins avaient déjà commencé, spontanément, gentiment, à apporter des vêtements pour le futur bébé et proposer de l'aide pour sa maman, aimée de tous.

Pauvre d'esprit et de corps, mais elle a tout donné !
Aimée de tous parce qu'elle est simple, souriante, attendrissante. Son incapacité a été froidement évaluée à 80 %, « totale et permanente », par le corps médical. Cela ne rend aucunement compte de l'impact de sa personnalité et de sa place dans cette communauté pauvre, mais éminemment humaine. C'est ce qu'a pensé le journaliste du Diario de Cuyo : il ne s'explique l'attitude des uns et des autres que par le fait que cette jeune femme toujours joyeuse soit quelqu'un de « spécial », appréciée de tous.

Après avoir souffert de l'agression innommable du viol, et malgré tout, la jeune maman a trouvé un vrai bonheur avec son bébé qu'elle garde tout le temps avec elle : elle l'allaite depuis sa naissance, le change, le soigne. Elle lui a donné la vie qu'il n'avait certes pas demandée, pas plus qu'elle : comme un cadeau, un don qu'on ne refuse pas parce qu'il est arrivé d'une mauvaise façon, une vie qu'on ne détruit pas à cause du crime d'un homme.

Ce crime-là, oui, il devra être poursuivi. Dès qu'ils découvrirent l'état de grossesse de leur fille et son probable auteur, les parents ont rompu tous liens avec de gendre indigne. Mais – pour protéger leur autre fille ? – ils ne l'ont pas dénoncé. La naissance du bébé a tout rendu public aux yeux des autorités et c'est alors que Hilda a officiellement porté plainte ; tous attendent la prochaine arrestation du jeune homme.

A la famille reste néanmoins le bonheur et la tendresse apportés par cette nouvelle petite vie.

Qui osera dire qu'il aurait dû payer pour le crime de son père, et subir la peine capitale que celui-ci n'encourt même pas ?

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