Refus de soins pour « prolonger » la vie : en Italie, un nouveau cas met la pression
Le Salon beige a déjà reproduit de larges extraits de cet article publié dans Présent daté du 6 août. Je le remets ici sur mon blog car il est à verser au dossier des pratiques à la marge de l'euthanasie qu'il faudra bien éclaircir davantage un jour.
C’est un cas si compliqué que la presse française n’y a rien compris. Une femme de Trévise, témoin de Jéhovah, âgée de 48 ans et atteinte d’une grave maladie dégénérative, provoque actuellement une polémique en Italie par sa demande de ne recevoir aucun traitement médical, quitte à en mourir. C’est en janvier dernier qu’elle a obtenu du juge des tutelles du tribunal de Trévise, Clarice di Tullio, un décret l’autorisant à refuser tout médicament capable de la maintenir en vie ; son mari se voyait octroyer le même droit en tant que personne désignée comme « administrateur de soutien ».
Il ne s’agit donc pas du tout de la « maintenir artificiellement en vie », comme le dit la presse française, – d’ailleurs sa vie ne serait actuellement pas en danger – mais de lui permettre de refuser les médicaments – même une aspirine si celle-ci était en mesure d’éviter son décès.
La patiente a déjà refusé une trachéotomie et une transfusion.
Et elle a déclaré par « testament de vie » (actuellement non réglementé par le droit italien) : « Je ne veux pas que ma vie soit prolongée si les médecins sont raisonnablement convaincus que mon cas est sans espoir. »
Ce qui va loin en effet, permettant un refus global de tous soins, sans que l’on sache si cela concerne la nourriture et l’hydratation, qui seuls sont dus même si les soins médicaux sont arrêtés, ou refusés par le patient.
Le décret du juge di Tullio « voudrait concourir à introduire le suicide assisté et programmé que notre ordre juridique ne permet pas. Seul le Parlement peut prendre des décisions aussi importantes, j’espère qu’il ne le fera jamais », a dénoncé le ministre du Travail Maurizio Sacconi, catholique affirmé.
Argument balayé par Massimo Cozza, du syndicat de médecins CGIL Medici (gauche) : « Ce jugement ne constitue pas une aide au suicide assisté et programmé, mais une garantie du respect des volontés exprimées comme le prévoit le code de déontologie des médecins. »
Le 12 juillet dernier, la Chambre des députés a voté une loi pro-vie interdisant le recours à l’euthanasie et introduisant la possibilité d‘établir une sorte de testament biologique, tout en disposant que l’alimentation et l’hydratation ne peuvent jamais être suspendues, sauf lorsqu’elles « ne sont plus efficaces ou adaptées aux conditions de vie du patient », ce qui traduit exactement l’exigence de ne pas porter atteinte volontairement à la vie.
Si cette loi est approuvée par le Sénat, la situation de la Trévisienne pourrait être modifiée car c’est alors le médecin qui exercerait l’autorité de tutelle en ce qui concerne les médicaments à administrer. Ce qui devrait lui revenir de droit, estime le bioéthicien Francesco d’Agostino.
Dans cette affaire assez confuse, on notera au moins ceci : les médias l’utilisent pour promouvoir le droit de se laisser mourir sans se poser de questions précises sur les soins qu’il est légitime, ou non, de refuser.
www.present.fr.
D'autres informations sur leblogdejeannesmits.
2 commentaires:
vous écrivez "sa vie ne serait actuellement pas en danger" excusez-moi de vous poser la question mais avez-vous eu accès à son dossier médical comme le juge des tutelles du tribunal de Trévise qui en a eu besoin pour statuer sur le cas de cette dame ? Et vraisemblablement Massimo Cozza, du syndicat de médecins CGIL Medici ? J'en doute fort ...
Non, bien sûr, je n'ai pas eu accès au dossier médical, pas plus, je pense, que Massimo Cozza.
Je ne prétends pas éclairer complètement cette affaire qui est délicate et dont évidemment des aspects m'échappent.
Je cherche juste à faire noter que s'agissant d'une autorisation – donnée il y a six mois – de refuser tout soin médical susceptible de prolonger la vie (cette femme risquant dès lors de mourir de la maladie dont elle est atteinte), on n'est pas du tout dans le cas d'Eluana Englaro tuée par privation de nourriture et d'hydratation.
Ce qui m'étonne, c'est qu'elle est montée en épingle par la presse six mois plus tard, reprise avec de multiples erreurs de fait par la presse non-italienne et notamment française, et présentée avec la volonté de justifier la privation des soins ordinaires et non l'arrêt de soins médicaux (qui certes pose d'autres questions).
Enregistrer un commentaire