19 mai, 2011

Pays-Bas : pas besoin d'une loi pour « faciliter » l'euthanasie ?

Une initiative citoyenne en cours aux Pays-Bas pour obtenir des règles plus souples permettant aux personnes âgées de « bénéficier » de l'euthanasie lorsqu'elles sont simplement « fatiguées de vivre » est au moins pour partie « inutile » dans la mesure où la loi offre déjà des solutions à ce type de demandeur, ont déclaré des experts devant la Deuxième chambre cette semaine. La chambre basse néerlandaise examine actuellement la proposition du groupe « Uit vrije wil » (« De plein gré ») qui fait campagne à l'aide de pétitions et d'engagement de personnalités connues pour faire admettre qu'il faudrait légaliser le suicide assisté et rendre accessible des pilules mortelles pour permettre aux gens de plus de 70 ans de mettre fin à leurs jours sans être obligés de satisfaire à des conditions de douleur physique ou de situation de phase terminale.

Mercredi, plusieurs spécialistes ont soutenu au cours de l'audience parlementaire qu'il n'en est nul besoin, étant donné que la loi sur l'euthanasie ménagerait déjà une large place à ces cas de figure en permettant l'intervention dès lors que le demandeur souffrirait d'une affection médicale connue, qu'il n'aurait aucun espoir d'amélioration de son état et que l'euthanasie constituerait la seule option pour faire disparaître la souffrance, sans qu'il soit exigé que l'affection soit en phase terminale.

Le collège royal des médecins néerlandais (KNMG), avait fait savoir dès décembre dernier qu'une multitude de maux liés à la vieillesse pouvaient être pris en compte pour permettre ensemble de justifier l'euthanasie. On peut ainsi retenir, selon les médecins, les difficultés de d'audition et de vision, les défaillances motrices et l'incontinence. Pas précisément des douleurs que l'on soigne à la pompe à morphine…

En plaidant ainsi pour une application large de la loi autorisant l'euthanasie, les spécialiste auditionnés semblent vouloir éviter une modification législative qui aboutirait à faciliter très largement les « morts choisies » : Uit vrije wil propose en effet de créer des instances composées d'assistants à la fin de vie qui pourraient mettre en œuvre le désir de mort de personnes sans affection médicale : « Il ne doit pas être question de confier l'assistance au suicide à des gens qui ne la considèrent pas comme problématique », a observé le Dr D. Trouwen, spécialiste d'éthique à l'université de Leiden. Le risque étant, selon un autre intervenant, que des personnes âgées cherchent à se faire éliminer parce qu'elle se considèrent à charge ou de trop dans la société.

En s'opposant aux demandes extrêmes qui émanent des milieux libres-penseurs – comme la « Ligue humaniste » (Humanistisch verbond) qui soutient Uit vrije wil, les médecins du KNMG et nombre d'experts entendus mercredi ont révélé la faiblesse de leur principes. Pour beaucoup, ils ne sont pas opposés à l'euthanasie en tant que telle, se mobilisant plutôt pour ne pas (trop) faire dériver les limites actuellement imposées. Ils prennent ce faisant le risque d'étendre encore le champ d'application de la loi.

Les médecins du KNMG ont même un autre tour dans leur sac, qui me semble depuis quelque temps participer au « floutage » du concept d'euthanasie. En l'occurrence, ils ont présenté comme possible l'option d'une nouvelle forme de sédation palliative, qui serait déjà acceptable dans le cadre actuel et que l'on présente comme le choix conscient d'une mort lente. Le patient demandeur décide dans ce cas de figure de cesser volontairement de manger et de boire pour hâter sa propre mort. Le médecin n'interviendrait activement qu'en phase terminale pour offrir des soins palliatifs – le fait d'humecter la bouche, par exemple, précise-t-on – pour éviter les souffrances liées à la déshydratation.

Cela ne manque pas de poser des problèmes moraux, même si les médecins qui s'affirment pro-vie sont partagés à leur sujet. Certains y voient une assistance au suicide en bonne et due forme – et ce l'est probablement, dans la mesure où l'on cesse de s'alimenter en vue de mourir, et non parce que manger devient trop douloureux ou insupportable. D'autres jugent la procédure acceptable dans la mesure où c'est le patient seul qui prend la responsabilité d'un refus de s'alimenter sans demander une véritable assistance à quiconque.

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