09 avril, 2010

L'Eglise et la bioéthique : Mgr d'Ornellas s'explique


La Conférence des évêques organisait mardi matin une conférence de presse pour annoncer la réactivation du blog bioéthique de l’Eglise de France (www.bioethique.catholique.fr) édité par le « groupe de travail des évêques sur la bioéthique ».

Mgr d’Ornellas, évêque de Rennes, plus particulièrement chargé de ces questions en tant que président du groupe de travail, a commenté le rapport de manière somme toute favorable, soulignant que celui-ci récuse une démarche de respect sans critique de ce qui est possible techniquement : « La primauté de l’éthique me semble être consacrée par le rapport (…), dans la droite ligne de ce qu’ont voulu les citoyens lors des états généraux de la bioéthique. »

Le deuxième point positif, selon le prélat, c’est la prise en compte explicite de « l’intérêt de l’enfant à naître » (dans les décisions relatives à la procréation médicalement assistée, on ne dit rien sur l’avortement, bien sûr, sujet tabou).

Mgr d’Ornellas est un intellectuel sûrement habile, qui aime la spéculation, le questionnement qui évite d’imposer un point de vue, le « dialogue » où « l’on ne cherche pas à être entendu, mais à chercher ensemble ». Joliment, il explique que la mère d’un enfant handicapé qui dit, « C’est mon enfant, je l’aime », aura aussi bien dit la réalité qu’un scientifique décrivant son état médical. « J’ai vu des scientifiques retournés comme des crêpes après avoir passé une journée dans un foyer de l’Arche », ajoute l’évêque.

Même si l’on comprend sa volonté de faire ainsi partager par tous le respect de la dignité humaine de chacun, du plus petit des petits au plus handicapé des handicapés, ce parti pris m’a agacée, et au vu de la progression de la culture de mort, scandalisée. Car si la bioéthique est « chemin de bonheur » – c’était l’intitulé de la conférence de presse – encore faut-il dire aux hommes où se trouve ce bonheur, dont l’Eglise catholique connaît la source et la réalité.

Les journalistes ne sont pas nombreux ; je peux poser plusieurs questions. Comme celle-ci : L’Eglise, avec Donum vitae et L’Evangile de la vie n’a-t-elle pas clairement dit que la fécondation in vitro n’est pas conforme à la dignité humaine et quel est le minimum éthique que l’on peut essayer de faire respecter par la loi ? Réponse de Mgr d’Ornellas :

Il n’y a pas de minimum éthique, Ce serait une sorte de plus petit dénominateur commun. La lumière doit être celle des personnes qui souffrent : respect de la dignité humaine chez autrui et chez soi. Il n’y a pas de minimum ou de maximum éthique. Seuls les pervers ne la respectent pas, la dignité humaine : ceux qui sont atteints de cécité complète. Ce respect rencontre des circonstances diverses qui sont plus ou moins douloureuses et qui affaiblissent la force pour être dans le respect. (…) S’il y avait un minimum éthique ? Comment ceux qui ne souffrent pas et qui ne peuvent pas prétexter quoi que ce soit peuvent-ils aider ceux qui souffrent ? (…) Le jour où la loi civile ne fait pas tout pour respecter la vie humaine elle est fautive… Mais il est très difficile de savoir comment aider ; comment donner par exemple le résultat d’une échographie. Le rapport parle sans cesse de l’autonomie de la femme. Est-ce que cela est juste ? Est-ce qu’une liberté est dans le splendide isolement de toutes choses pour être autonome ?
Comme cette réponse me laisse sur ma faim, je reformule ma question, respectueusement : sur la question précise de la fécondation in vitro dont Donum vitae a montré qu’elle n’est pas conforme à la dignité de l’homme ni à son bonheur, faut-il œuvrer pour faire changer la loi civile ? Réponse :
Nous sommes tous plus ou moins aveuglés sur la beauté inouïe de la vie humaine. La voir dans son sommet, ce n’est pas facile. Quand l’Eglise parle, elle indique le sommet. Pour la procréation au sens théologique, l’Eglise a le mot de domination. Quand la technique domine l’acte de procréation, elle dit que ce n’est pas conforme à la beauté de la dignité humaine. Du coup le mot signifie la plus ou moins grande distance par rapport à cette dignité selon les techniques employées. Nous avons tous à travailler pour nous rapprocher de ce sommet de la montagne, mais ça monte, et ce n’est pas facile de monter. L’important, c’est quand toute la société fait l’acte de monter, pour s’affranchir du lobbying.
Lobbying de qui ? Je suis sortie de là en pensant qu’il restait décidément bien efficace…

 Ce texte est extrait d'un article plus complet paru dans Présent daté du 10 avril 2010.



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