18 novembre, 2014
Un avenir sans « grossesses
non désirées » et « sans avortements » : c’est ce que
prévoit le Pr Carl Djerassi pour 2050, date à laquelle, pense-t-il, une bonne
part des bébés du monde occidental naîtront par fécondation in vitro, par procréation médicalement
assistée, donc. Connu comme l’un des inventeurs de la pilule contraceptive, le
professeur austro-américain envisage l’obsolescence de son invention :
jeunes hommes et jeunes femmes congèleront leurs gamètes, et se feront
stériliser, certains de pouvoir recourir à la PMA, estime-t-il.
Dans une interview au Daily
Telegraph, le scientifique justifie ses prédictions par le taux de
succès grandissant des fécondations artificielles, ce qui permettra selon lui
de les envisager en dehors du contexte d’infertilité, tout en rassurant la
« génération mañana » sur le fait qu’elle pourra tranquillement
remettre la maternité ou la paternité à plus tard – avec la certitude que
sperme et ovules, prélevés dans leur jeunesse, sont de « meilleure
qualité ».
A la manière d’un Jacques Attali,
Djerassi croit tout pouvoir prédire – mais il est vrai que la culture ambiante
pousse en ce sens. « La grande majorité des femmes qui choisiront la FIV à
l’avenir seront des femmes fertiles qui ont congelé leurs ovules et remis leur
grossesse à plus tard. Les femmes de vingt ans choisiront d’abord cette
approche comme une forme d’assurance, qui leur procure la liberté face aux
décisions professionnelles, ou en l’absence du bon partenaire, ou du tic-tac
inexorable de l’horloge biologique. Cependant, je prédis que beaucoup d’entre
elles décideront d’être fertilisées par IVF en raison des avancées des
diagnostics génétiques préimplantatoires. Et une fois que cela se produira, l’IVF
deviendra une façon normale, non-coïtale, d’avoir des enfants »,
pense-t-il.
Ce sera l’ultime séparation entre
le sexe et la reproduction, assure cet homme de 91 ans qui aura accompagné la
« libération sexuelle » des années 1960 avant d’en produire l’aboutissement
logique.
Dans ces prévisions dignes du Meilleur des mondes, on voit bien la
conjonction contre nature entre la maîtrise absolue de la fécondité, l’eugénisme
total, et la dénaturation de la sexualité. Et de la paternité et de la
maternité : combien de temps durerait l’envie d’être parents biologiques
de ses enfants, si un « produit » de meilleure qualité devenait ainsi
facilement accessible ? Et pourquoi, à ce moment-là, ne pas généraliser ce
qui se fait déjà aujourd’hui de manière exceptionnelle : « louer »
une mère porteuse pour ne pas abîmer son corps, interrompre sa carrière, vivre
les affres de la grossesse ?
De toute façon, l’activité
sexuelle n’aurait plus alors aucune signification : dénuée de sa finalité
procréatrice, elle serait du même coup vidée de sa finalité unitive, pour ne
garder qu’une dimension « récréative », sans responsabilité et sans
conséquence. Un monde totalement inhumain…
Ce n'est pas cela, pourtant, que lui reprochent les nombreux articles critiques parus dans la presse britannique à la suite de cet entretien : on met l'accent sur le danger de mettre tous ses « œufs » dans le même panier, sur la manière dont de telles promesses peuvent tromper les gens sur la maîtrise absolue de la fertilité, qui reste hors de portée. Mais sur le principe ? Pas de problème !
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