Critique cinglante du document de la Congrégation pour l’éducation catholique sur l’idéologie du genre par le Pr Gerard van den Aardweg
Mais il ne s’agit pas là d’une garantie d’orthodoxie. Le psychiatre néerlandais Gerard van den Aardweg (membre de la nouvelle Académie Jean-Paul II pour la vie humaine et la famille), auteur d’ouvrages sur la tromperie du mariage des couples de même sexe et des revendications du lobby LGBT, estime au contraire que la Congrégation pour l’éducation catholique a publié un texte « idéologique » qui se refuse à rappeler clairement l’enseignement de l’Eglise sur la sexualité et le mariage, n’apportant aucun conseil vraiment utile aux parents catholiques qui ont le devoir d’éduquer leurs enfants aux « vertus nécessaires à la vie chrétienne ».
Comment « dialoguer », en effet, avec les tenants d’une idéologie aussi radicalement contraire à la vérité que la « théorie » (ou plutôt, l’idéologie) du genre, en opposition frontale avec la doctrine de l’Eglise, cherchant en même temps à pervertir le sens des réalités et les exigences objectives de la loi naturelle ?
Diane Montagna, correspondante de LifeSiteNews à Rome, a interrogé le Pr van den Aardweg à propos du document. Ça décape… Traduction par mes soins. – J.S.
Diane Montagna : Dr van den Aardweg, quelle impression générale vous a laissée le nouveau document du Vatican sur la théorie du genre ?
Gerard van den Aardweg : Il s'agit essentiellement d'un document idéologique. Il n'est pas spécifiquement catholique, en dépit de quelques vœux pieux. Il s'agit essentiellement d'un plaidoyer en faveur d'une sorte d'éducation sexuelle athée, humaniste et socialiste, présentée comme plus ou moins catholique. Il s’extasie sur les avantages d'un modèle social d'éducation sexuelle contrôlé par des « experts professionnels » sur le fondement d'une vision de la sexualité de la part des sciences humaines actuelles qu’il suppose naïvement toujours plus approfondie. Ce document est un exemple du genre de discours illusoire et sentimental sur l'éducation et l'« affectivité » caractéristique de la psychologie humaniste immature et superficielle des années 1960 : la voici élevée au rang de « sagesse supérieure » par une Congrégation du Vatican dont les membres ont cinquante ans de retard. On en revient une nouvelle fois au « dialogue », a l’« écoute », à l’« ouverture ». Mais il n’est pas question d'écouter les enseignements divins de l'Eglise catholique sur la sexualité, le mariage et la famille (car ceux-ci semblent avoir besoin d'une « restructuration »). Enseigner et prêcher ces enseignements à un monde paganisé ne serait pas, semble-t-il, la voie à suivre. Le grand rêve est celui d’une « alliance » avec le néo-paganisme qui caractérise l'idéologie sexuelle, conjugale et familiale de l'ONU et des pays européens anti-chrétiens.
« Ecouter » ? Eh bien, en écoutant attentivement les formulations et les suggestions vagues et ambiguës du document afin de discerner vers quoi il tend, on peut discerner son objectif principal : le changement révolutionnaire.
D.M. Que pensez-vous de son analyse de la théorie du genre ?
G.v.d.A. Les observations sur la théorie du genre sont ambiguës et peu claires, ce qui les rend suspectes. Au premier abord, certaines expressions semblent correctes et « orthodoxes », comme le rejet de l’affirmation selon laquelle l'identité sexuelle n'est pas un choix de l'individu [« L’identité humaine est laissée à une option individualiste »] et les platitudes comme « la sexualité » (le sexe) est « une composante fondamentale de la personnalité » ou chaque cellule du corps est masculine ou féminine [« les cellules de l’homme sont différentes de celles de la femme dès la conception »].
Mais ces affirmations sont dans le même temps affaiblies par des déclarations telles que (je résume) : « La bonne approche de la théorie du genre est la voie du dialogue. » Pourquoi en serait-il ainsi ? Il n’y a pas de réponse, parce que nous sommes dans le domaine de l'idéologie. A propos de quoi pourrait-on dialoguer ? Nous connaissons savons où mène le dialogue grâce à l’expérience avec les communistes. Les ennemis du christianisme vont dialoguer avec vous à leur manière, en imposant leurs conditions. Au bout du compte, on n’arrivera à rien d’autre qu’au le dialogue avec le diable. L'idéologie sexuelle néo-païenne agressive du monde n'a aucune sagesse que nous pourrions partager. La tâche de l'Eglise n'est pas de dialoguer mais d'enseigner et de corriger. Nous sommes au milieu d’une guerre spirituelle sans pitié dans le domaine de la sexualité, du mariage et de la famille.
Autre exemple : « Il ne manque pas de recherches sur le genre qui s’efforcent d’approfondir de manière appropriée », phrase suivie d’une vague référence à des ouvrages sur « la façon dont on vit dans les diverses cultures la différence sexuelle entre homme et femme ». Ici comme partout dans ce document, seules des suggestions ou des insinuations sont proposées, sans l’ombre d’une preuve. Alors, qu’entend-on ici par des « recherches » prétendument meilleures ? Je subodore que les auteurs se réfèrent aux écrits autrefois populaires de Ruth Benedict et Margaret Mead, les féministes lesbiennes qui ont tenté de montrer la relativité des rôles et fonctions sexuelles dans les sociétés non occidentales. Mais leurs affirmations ont longtemps été réfutées comme étant fondées sur des preuves fausses, et même en partie frauduleuses.
La relativisation de l’impopulaire vision biblique des relations homme-femme et des « rôles » sociaux, qui constitue un soutien apparent à l'indignation féministe (et gay ?), apparaît également dans l’invocation désinvolte de « subordinations injustes » qui auraient « tristement marqué l’histoire et (…) eu une influence même à l’intérieur de l’Eglise ». L'Eglise aurait violé « l'égale dignité de l'homme et de la femme » du fait « d’un certain masculinisme plus ou moins camouflé derrière des motivations religieuses ». S'il ne s'agit pas d'une raillerie à l'égard des enseignements catholiques sur l'homme en tant que chef et la femme en tant que cœur de la famille, et sur le devoir de la femme d'obéir à son mari, que cherche-t-on à suggérer ? Ou bien, vu sous un angle différent, qui peut croire que les auteurs de ce texte sont encore capables de transmettre les enseignements divins immuables des Apôtres, de saint Augustin, des papes Léon XIII et de Pie XI ? Probablement, ces auteurs, aveuglés par l'esprit du temps (Zeitgeist), ne les comprennent même plus, et ils ne semblent pas non plus connaître et comprendre la vision anthropologique et psychologique correcte de sainte Edith Stein selon laquelle « la femme est par nature mère et compagne de l'homme ». Car tout catholique qui connaît et comprend cette vérité en aurait fait la pierre angulaire d'un discours sur la valeur égale de l'homme et de la femme.
Tout aussi inquiétante est l'appréciation discutable des auteurs de la famille naturelle : « La définir à travers des concepts de nature idéologique, qui n’ont une force qu’à un moment donné de l’histoire, puis périclitent signifie en trahir la valeur. » Les enseignements apostoliques susmentionnés appartiennent-ils à la catégorie des « idéologies » historiques temporaires relatives au masculin et au féminin ? Si ce n'est pas le cas, pourquoi ne sont-ils pas du tout recommandés ? Et quels sont les faux concepts idéologiques qui ont été attachés à la famille et qui ne sont pas essentiels ? Par exemple, le concept traditionnel de la famille chrétienne, considéré à la lumière des perspectives éclairées actuelles, a-t-il été rétréci par nos préjugés culturels ? En résumé, donnez une définition claire et sans ambiguïté de la famille naturelle et de la famille voulue par Dieu et rejetez sans ambiguïté la définition politique proposée par les démocrates chrétiens, entre autres.
D.M. Le document cite fréquemment Jean-Paul II. Que pensez-vous de l’utilisation de ses écrits ?
G.v.d.A. Le pape Jean-Paul II est cité, mais de manière assez hypocrite. On abuse de son prestige pour créer une impression d'orthodoxie, une caractéristique que l’écrit dans son ensemble n’est pas en droit de revendiquer. Les auteurs ont même le courage pervers de citer le nom de Don Bosco, dont les enseignements et les efforts étaient diamétralement opposés aux leurs et étaient donc vraiment exemplaires.
D.M. Le document part-il du principe que l'éducation sexuelle devrait toujours être disponible dans les écoles ? La position du document à cet égard est-elle conforme à l'enseignement constant de l'Église ?
G.v.d.A. Les droits parentaux en matière d’éducation sont professés avec des mots, mais dans son ensemble et par essence l'organisation socialiste-bureaucratique visant à éduquer la « sexualité et l'affectivité » des enfants et des jeunes dont rêvent ces utopistes va sans doute bientôt réduire les droits des parents jusqu’à les faire disparaître totalement. Les « professionnels » de l'éducation proposés à l'intérieur et à l'extérieur de l'école, avec leur « éducation permanente » qui leur vient des « universités », etc., forts de leur association étroite avec les organisations laïcistes (« locales, nationales et internationales » !) avec leurs nouveaux « supports, guides pédagogiques et
manuels didactiques », payés par qui d'autre que l'Etat, garantiront une éducation sexuelle politiquement correcte. Le document propose une « alliance éducative entre la famille, l'école et la société » idéalisée : venez aux Pays-Bas, en Allemagne ou en Grande-Bretagne pour voir comme elle fonctionne bien... Personne ne s'y oppose : aucune école, aucun collectif de parents catholiques, sauf parfois tel rare professeur catholique, tel solitaire, quelques parents catholiques exceptionnels, qui refusent de coopérer avec ces joyeux « programmes » violent l'innocence de leurs élèves et de leurs enfants. En effet, comme le fait remarquer ce document du Vatican, « la famille ne peut être laissée seule face au défi éducatif. » Et l'« autorisation » des parents est un bon principe, mais « dans une certaine mesure ».
D.M. Avez-vous d'autres commentaires ?
G.v.d.A. La conclusion du document, bien qu'elle évite elle aussi un langage honnête, simple et sans ambiguïté, aide à en saisir le sens et les objectifs réels. Considérez ces déclarations de haut vol : « Les éducateurs ont la fascinante mission éducative d’“enseigner plutôt un cheminement quant aux diverses expressions de l’amour, à l’attention réciproque, à la tendresse respectueuse, à la communication riche de sens” » ; « coopérer à la formation de jeunes ouverts et intéressés par la réalité qui les entoure, capables de soin et de tendresse ».
C'est précisément l'argumentaire de vente du Mouvement néo-païen pour la réforme sexuelle depuis au moins un siècle. Toutes sortes de relations sexuelles ou « amoureuses » s'inscrivent dans cet idéal, qu'elles soient hors mariage ou homosexuelles. Il n'y a rien dans le texte du Vatican sur le péché sexuel, la lutte pour la chasteté, la masturbation, l'infidélité dans le mariage, la cohabitation hors mariage, la chasteté dans le mariage ; pas une phrase de conseils judicieux pour les parents qui essaient d'éduquer leurs enfants aux vertus nécessaires à une vie chrétienne et contre la pression du milieu néo-païen, de l'école, voire de l'église ; rien sur la contraception, la stérilisation, l'avortement.
Pour finir, le style de ce document est épouvantable : il est imprégné d'un langage pompeux et sentimental, d'une onction hypocrite. Le niveau intellectuel est médiocre. Aucun concept utilisé n'est défini, aucune affirmation n'est prouvée ni même soutenue par quelque argumentation ; les références et remarques relatives à l'anthropologie et à la psychologie (« les sciences humaines ») sont déplacées ou carrément absurdes, et pourtant elles sont présentées sans rire comme une sagesse supérieure.
Une Congrégation du Vatican qui ose produire et émettre un tel document devrait sérieusement envisager de mettre la clef sous la porte.
Propos recueillis par Diane Montagna pour LifeSiteNews ; © leblogdejeannesmits pour la traduction. Crédit photo : Steve Jalsevac.
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