Mgr
Vito Pinto poursuit en invoquant également le soutien du cardinal
Ratzinger, qui avait introduit l’instruction de la Congrégation pour la
doctrine de la foi sur la pastorale des divorcés remariés en
observant : « On devrait clarifier la question de savoir si
vraiment tout mariage entre deux baptisés est ipso facto un mariage sacramentel. De fait, le Code
lui-même indique que seul le contrat matrimonial « valide »
entre baptisés est en même temps sacrement (cf. CIC,
can. 1055, § 2). La foi appartient à l’essence du
sacrement. »
En fait, il s’agissait de l’introduction d’un
livre intitulé Sur la pastorale des
fidèles divorcés remariés, publiée par la Librairie éditrice vaticane
dans la collection Documents et
études du dicastère, et non d’une instruction de la Congrégation pour
la doctrine de la foi. Ce n’est pas tout à fait la même chose, d’autant
que le cardinal Ratzinger ajoutait aussitôt : « Reste à
éclaircir la question juridique, quant à savoir quelle évidence de
“non-foi” aurait pour conséquence qu’un sacrement ne se réalise pas. »
A vrai dire si l’on poussait le raisonnement à bout on en
arriverait à la situation où aucun athée, ni même aucune personne ayant
perdu la foi, provisoirement même et en tout cas au moment de son
mariage, ne pourrait contracter une union sacramentelle, bénie par
l’Eglise avec une personne croyante. Et quid des mariages mixtes ? Suffirait-il de croire en
Dieu ? Mais quel Dieu ?
Et que faire alors des mariages de non-chrétiens qui sont des
mariages à part entière, sur le plan naturel : s’ils ont baptisés
par la suite ils reçoivent de ce fait même la grâce du sacrement… La
fidélité, l’indissolubilité, l’ouverture à la procréation sont, pour le
mariage, de l’ordre de la nature.
Voilà bien des questions qui semblent avoir été laissées de côté
et dont le cardinal Ratzinger suggérait qu’elles devaient être d’abord
examinées.
Il devait y répondre lors de son dernier
discours au tribunal de la Rote en affirmant : « Le pacte
indissoluble entre un homme et une femme n’exige pas, afin d’assurer son
caractère sacramentel, la foi personnelle des futurs époux ; ce qui est
demandé, comme condition minimale nécessaire, est l’intention de faire ce
que fait l’Église. » N’excluant pas les questions posées par ceux
qui n’auraient « aucune trace de foi » (« disposition à croire »), « ni aucun
désir de grâce ni de salut », il précisait néanmoins ce que
Jean-Paul II avait dit devant le même tribunal dix ans plus
tôt : « Une attitude des futurs époux ne tenant pas compte de
la dimension surnaturelle du mariage peut le rendre nul uniquement si
elle porte atteinte à la validité sur le plan naturel, sur lequel est
placé le signe sacramentel lui-même. » En notant qu’aujourd’hui ce
bien même simplement naturel peut être « blessé » par le manque
de foi.
Mgr Vito Pinto était présent lors de ce discours qui posait certes
des questions mais évitait tout « automatisme facile ».
Mgr Vito Pinto assure que Benoît XVI et François partagent un
« point d’analyse commun » à propos « du sacrement célébré
sans foi de la part d’un grand nombre de divorcés remariés civilement,
contraints à vivre dans les périphéries, loin des portes de nos
églises ». Peut-être. On se souvient en effet de la sollicitude
pastorale du pape émérite souhaitant, comme ses prédécesseurs, que ces
personnes ne rompent pas avec l’Eglise, qu’elles conservent la pratique,
dominicale notamment, qu’elles exercent les œuvres de charité, et
qu’elles éduquent chrétiennement leurs enfants. Mais on se souvient aussi
de ses discours à la Rote Romaine qu’il exhorta à plusieurs reprises de
ne pas prononcer des nullités à la légère, l’invitant à plus de rigueur.
Il est vrai que Mgr Vito Pinto arrête là la comparaison.
« Mais il y a une nouveauté essentielle qui met en évidence la
mission propre du pape François. Ce n’est plus l’heure de l’analyse,
c’est l’heure d’agir, de donner l’impulsion à cette œuvre de justice et
de miséricorde attendue depuis trop longtemps, en réordonnant la pratique
pastorale et canonique qui est substantiellement en vigueur depuis un peu
moins de trois siècles. C’est ce qu’annonçait François au début de son
pontificat, le 28 juillet 2013, lors de la conclusion des JMJ à Rio de
Janeiro. »
Pour comprendre, poursuit le prélat, il faut rappeler que l’un des
points centraux du pontificat est celui-ci : « L’Evangile du
Christ met les pauvres au centre. »
Il explique un peu plus loin : « Ainsi François, avec
cette loi fondamentale, donne-t-il le véritable coup d’envoi à sa
réforme : en mettant au centre les pauvres, c’est-à-dire les
divorcés remariés tenus au loin ou considérés comme tels, en demandant
aux évêques une véritable metanoia.
C’est-à-dire une “conversion”, un changement de mentalité qui les
persuade et les encourage à
répondre à l’appel du Christ, présent dans leur frère, l’évêque de
Rome, en passant du nombre restreint de quelques milliers de nullités à
celui, démesuré, des malheureux qui pourraient obtenir la déclaration de
nullité – en raison de l’évidence absence de foi en tant que
passerelle vers la connaissance et donc la libre volonté de donner le
consentement sacramentel – mais il sont laissés dehors par le
système en vigueur. »
Un nombre « démesuré », vraiment ? Ne
s’oriente-t-on pas vers l’« automatisme facile » ? Au nom
d’une « metanoia », d’une « conversion » non pas au
Christ, la seule qui vaille, mais à un changement de mentalité qui leur
permette de prononcer un nombre « démesuré » de nullités.
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