28 juillet, 2014
La Chine, qui doit à la masse de sa population son essor économique actuel, a trop joué avec sa démographie. Menacée d'un hiver démographique aux conséquences sociales désastreuses, elle a décidé de relâcher un peu sa politique de l'enfant unique mais les résultats ne sont pas au rendez-vous : c'est durablement, semble-t-il, que les Chinois se sont résignés à limiter de manière drastique leur descendance, pour de multiples raisons analysées par The Economist.
Si l'on voulait bien appeler les choses par leur nom, on ajouterait que la Chine est victime des « structures de péché » – selon l'expression de Jean-Paul II – que des années de communisme ont consolidées.
L'assouplissement de la politique de l'enfant unique date de la fin de l'année dernière : désormais, si au moins l'un des deux membres d'un couple est enfant unique, un permis peut être délivré pour une deuxième grossesse. Les autorités de la commission nationale du planning familial envisageaient entre 1 et 2 millions de naissances supplémentaires à court terme, répondant au désir d'enfant frustré chez de nombreux couples. En définitive, fin mai, seuls 270.000 couples avaient fait la demande de ce permis de procréer ; 240.000 permis étaient accordés. Les autorités chinoises espèrent à terme une légère hausse de la natalité : 17 millions de naissances par an au lieu des 16 millions actuels.
Plusieurs freins ont joué, selon The Economist. Le premier est celui de la bureaucratie chinoise elle-même : dans les provinces, on a ralenti et compliqué les processus afin d'éviter un babyboom soudain que ni les hôpitaux, ni les écoles ne pourraient absorber. La paperasserie a été démultipliée, histoire d'éviter un embouteillage prévisible alors qu'en théorie, 11 millions de couples pourraient théoriquement demander à bénéficier de la mesure.
On notera au passage que loin de reconnaître le droit souverain des familles d'accueillir la vie, le gouvernement communiste chinois demeure intégralement dans le cadre de sa mainmise totalitaire, s'immisçant dans les alcôves avec la brutalité de toujours. Il reste impensable en Chine d'avoir un deuxième enfant, dans le cadre d'un contrôle de la population toujours aussi coercitif, sans passer par l'administration. Et qui dit contrôle, dit aussi sanctions, stérilisations, avortements forcés. A cet égard rien ne change.
Mais le permis de procréer n'est pas tout. Alors que la prospérité se répand parmi certaines catégories de la population, les familles chinoises ont peut-être envie d'avoir davantage d'enfants, mais redoutent les frais qui les accompagnent. Dans les villes, on se bat pour avoir une place dans une bonne maternelle : le choix se fait sur dossier, quasiment par concours. Le logement est cher. Et selon Crédit Suisse, il faut quelque 3.000 € par an pour élever un jeune enfant. C'est à peu près le niveau moyen des revenus en Chine.
A cela s'ajoutent les conséquences de 30 ans de politique de l'enfant unique : au lieu de pouvoir compter sur les grands-parents pour garder les enfants, bien des Chinois qui ont eu leur enfant tard sont maintenant obligé de prendre soin de la génération d'au-dessus comme de celle d'en-dessous. Et ils sont seuls, sans frère ou sœur pour alléger cette charge. Et la Chine ne connaît pas de système qui fait fonctionner (au meilleur des cas) la solidarité de tous.
La Chine affiche aujourd'hui 1,5 enfant par femme : en clair, d'une génération à l'autre, un quart de la population disparaît puisque le taux théorique de remplacement des générations est de 2,1. Il faut augmenter le rythme pour soutenir « la stabilité sociale et économique sur le long terme », affirme le journaliste. Cette capacité de remplacer ses générations serait « plus normale » pour un pays du niveau de développement de la Chine, note-t-il.
Et c'est là qu'on s'interroge. L'Europe connaît un taux de fécondité de 1,5 enfant par femme, ainsi que le souligne le journaliste. Comme la Chine. Mais sans s'en émouvoir du tout. Alors ce qui n'est pas normal pour la Chine le serait-il pour l'Europe ? Faut croire…
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