28 janvier, 2013
Elle avait 44 ans. A la fin de 2012, elle a obtenu l'euthanasie dont elle rêvait depuis plusieurs années. Ann G. a été jugée « apte » (si l'on peut dire) dans la mesure où elle souffrait d'une affection psychiatrique qui lui causait une souffrance insupportable. La loi belge n'exige nullement, en effet, que la maladie justifiant l'euthanasie soit grave ou en phase terminale : ce qui compte, c'est la perception subjective de la souffrance et l'idée, chez le patient, qu'il n'y a pas d'amélioration possible. A peine demande-t-on dans cette situation une confirmation du diagnostic du médecin principal par un collègue.
Quelques mois avant sa mise à mort, Ann témoignait encore lors d'émissions téléivisées contre son psychiatre qu'elle accusait d'avoir eu des rapports non désirés avec elle. Aujourd'hui ceux qui l'ont connue ne savent pas si, oui ou non, ces abus ont précipité le désir d'euthanasie.
L'affaire de Ann G. est particulièrement frappante. En 2007, souffrant déjà d'anorexie depuis 25 ans, la patiente a contacté un écrivain, Kristien Hemmerechts, avec une demande « lourde ». Elle désirait que son histoire fasse l'objet d'un livre. Elle annonçait vouloir se suicider, mais pas avant d'avoir publié…
Pour Kristien Hemmerechts, ce n'était en aucun cas « un appel au secours ». « C'était bien une demande clairement formulée de mettre joliment fin à sa vie de cette manière-là. »
Son psychiatre traitant, Walter Vanderryken, a publiquement reconnu qu'il avait eu des relations interdites avec plusieurs de ses patientes, parmi lesquelles Ann G. « A ce moment-là elle avait déjà fait sa demande d'euthanasie », a-t-il déclaré selon Nieuwsblad.
Kristien Hemmerechts raconte avoir espéré à ce moment-là que l'euphorie engendrée chez Ann G. par cet aveu de celui qui l'avait suivie depuis son adolescence allait lui redonner le courage de vivre :
« Elle n'avait jamais cru qu'il allait tomber de son piédestal. Mais l'euphorie fut de courte durée? Elle ne pouvait comprendre que personne n'empêchait Vanderryken de reprendre son travail. Il y a aussi le fait qu'il n'a jamais présenté d'excuses : cela la tourmentait beaucoup. Pour ce qui est d'une réaction humaine normale – dire pardon – la psychiatrie semble ne pas en être capable. »
Même si Mme Hemmerechts n'est pas en mesure d'affirmer que ce conflit a été directement responsable de la demande d'euthanasie de celle dont elle a suivi la vie pendant cinq ans, il est clair qu'Ann a toujours conservé sa « colère » à l'égard de son psychiatre, jusqu'à la dernière minute, programmée, de sa vie.
Les psychiatres belges affirment recevoir environ cinq demandes d'euthanasie par an de la part de femmes anorexiques, qu'ils n'arrivent pas toujours à soigner suffisamment pour qu'elles n'aient plus l'impression, comme Ann, d'« avoir un cancer dans la tête ». En général ils tentent cependant de dissuader leurs patientes en cherchant à améliorer leur prise en charge.
Pour Ann, victime de sa maladie comme de son thérapeute, c'est la mort qui a été choisie aussi bien par elle que par ses soignants qui ont laissé faire.
C'est assez commode finalement…
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