S. J. — Dans un de vos commentaires sur LifeSite, vous avez expliqué que dans le film Harry Potter actuellement sur les écrans, « le mal est présenté comme mauvais, et cependant les moyens mauvais par lequel on résiste au mal sont présentés comme bons ». Quels sont ces « moyens mauvais » auxquels vous faisiez allusion ?
M. O'B.— Les exemples abondent tout au long des sept volumes de la série. On trouve l’exemple le plus net dans le septième et dernier tome. Harry s’y emploie à une quête des sept « horcruxes ». Les horcruxes contiennent une portion de l’âme de Voldemort, puisque cet ennemi suprême a divisé son âme pour la répartir parmi ces objets mystiques répandus à travers le monde. Harry et son amie Hermione cherchent à trouver les horcruxes et à les détruire un par un, et ils parviennent à en détruire quelques-uns, ce qui veut dire qu’ils détruisent une partie de l’âme de Voldemort.
La bataille finale se produit après que Voldemort a tué Harry. Harry se trouve dans un état mystérieux au-delà de la tombe, et il rencontre feu Dumbledore, son ancien mentor, qui explique à Harry qu’il peut « continuer » (sans expliquer ce que cela signifie), ou qu’il peut retourner sur la terre. Harry choisit de retourner sur la terre. Il est littéralement mort mais il peut choisir de se ressusciter. Il est « l’Elu » mais il devient aussi, à partir de ce moment-là, le « Maître de la Mort ».
S’ensuit une dernière bataille. La baguette de sureau possède le pouvoir ultime de détruire totalement tout ennemi : elle est comme l’anneau dans Le Seigneur des Anneaux. Mais désormais, parce que Harry est mort et ressuscité, la baguette de sureau lui obéit. La baguette est dans la main de Voldemort et celui-ci la repointe vers Harry pour l’annihiler totalement une deuxième fois, mais parce que Harry est le Maître de la Mort, la baguette n’obéit plus qu’à lui et la malédiction rebondit sur Voldemort, le détruisant totalement.
S. J. — Donc, le fait d’utiliser la sorcellerie puissante, le pouvoir mauvais de la baguette constitue ces « moyens mauvais » par lesquels il résista à Voldemort dans ces moments ultimes ?
M. O'B. — C’est le moment climatique suprême de la bataille entre ce que l’on perçoit comme le bien et le mal dans la série. Mais il y a des centaines d’autres incidents où Harry recourt à des moyens immoraux afin de détruire ses ennemis. Par exemple, dans une scène précédente l’un des serviteurs de Voldemort insulte un professeur de Poudlard que Harry apprécie beaucoup. Harry lui envoie le sort « Cruciatus » (Endoloris) – un sort qui crucifie. C’est une torture innommable ; aucune douleur au monde ne lui ressemble. Harry décide tout simplement de le crucifier. C’est le même Harry qui, tout au long de la série, a menti, a commis des violences envers autrui – des ennemis humains, ses condisciples – parfois pour les punir de leurs attaques contre lui, parfois pour faire avancer sa propre cause. Le mensonge est présent en force tout du long, tout comme les autres formes de tromperie, ainsi que l’énonciation de centaines de sorts et d’ensorcèlements, tout cela allant de pair avec le mépris et la dérision, la violence, l'effusion de sang, la mort – la liste n’en finit pas.
S. J. — Mais tout cela est présenté comme bon, dites-vous.
M. O'B. — Cela est présenté comme bon parce que cela concourt à défendre les « bons » personnages face au mal suprême, qui est Voldemort. Voilà ce que l’exorciste de Rome, le P. Amorth, désignait dans sa mise en garde majeure sur le fait que la série des Harry Potter est envahie par le relativisme moral – elle enseigne presqu'à chaque page que la fin justifie les moyens.
S. J. — Comment Harry aurait-il dû vaincre Voldemort, ou essayé de le vaincre, de manière morale ?
M. O'B. — La prémisse fondamentale du monde de Potter est qu’il n’y a pas d’autre moyen de vaincre Voldemort que d’utiliser les mêmes outils de la mort que lui. Il faut se rappeler que les histoires se déroulent non seulement dans une dimension secrète de notre monde réel, mais aussi dans la Grande-Bretagne contemporaine. Peut-on concevoir une bonne sorcellerie qui aurait raison de la mauvaise ? Pas du tout. Ainsi la question en elle-même n’est pas susceptible d’une réponse. Si vous décidez de créer un univers moral brouillé dans une œuvre de fiction, il n’existe aucun moyen de le débrouiller de manière à présenter un moyen vraiment justifiable de vaincre le mal par le mal. Et c’est cela, la prémisse de ces livres et de ces films : des activités absolument interdites par Dieu et par l’Eglise sont présentées comme des forces qui sauvent. L’attitude sous-jacente de Rowling est celle-ci : « Faisons semblant que les règles posées par Dieu ne s’appliquent pas à nous. Cela peut nous être permis parce que nous sommes les bons, les gentils, et voyez combien Voldemort est mauvais. »
S. J. — En tant que chrétiens qui essayons de vaincre Satan, nous ne pouvons pas le vaincre du tout si ce n’est pas le Christ, donc ?
M. O'B. — C’est la vérité fondamentale de notre foi. Et la série tout entière, comme les films, postule une réalité contraire : que l’on peut vaincre le mal absolu en s’emparant des armes du mal – tant que les instruments mauvais, les méthodologies, la connaissance gnostique et les sorts sont présentés comme étant moralement neutres.
(à suivre)
4 commentaires:
Il est assez révélateur qu'en voulant illustrer son assertion que "sans cesse", de façon répétée, tout au long de l'histoire, le mal commis en vue d'un bien serait justifié,
Michael O'Brien n'ait finalement pas grand-chose à fournir.
..sinon un gros contre-sens, qui pur l'instant montre uniquement qu'il n'a pas compris ce passage (ce qui peut se comprendre, l'histoire du tour de passe-passe entre les baguettes étant un peu confuse au premier abord) :
. ce n'est PAS parce que harry serait "mort et ressuscité" que la baguette lui obéirait.
. et ce n'est même pas vraiment parce qu'elle lui obéit qu'il gagne.
Reprenez toute l'histoire :
. Voldemort est vaincu, à ce moment, par sa trop grande confiance en lui. Il a tout interprété à l'aune de sa confiance absolue en ses grands pouvoirs, or ses plans n'ont en fait pas marché comme il l'avait prévu.
. Harry s'est rendu maître de la "baguette de sureau"... sans le vouloir, et sans le rechercher. Simplement, en désarmant son propriétaire précédent, Drago Malfoy, à un tout autre moment où son seul souci était de sauver son amie, Hermione Granger.
Vous noterez que sur ce point Michael O'Brien tombe donc dans un contre-sens, justement au moment où il veut amener la preuve indubitable de ses affirmations au sujet des notions de bien et de mal dans "Harry Potter".
Ce qui doit nous amener à constater que ses conclusions, sur ce point en tout cas, mais sur ce point important, se fondent finalement sur une mauvaise compréhension du texte lui-même et sur un contre-sens.
. Il est aussi intéressant et fondamental de noter ici ce point : lors de ce duel final, Voldemort est tué par son propre sort, qui "ricoche" sur celui lancé par Harry - qui, lui, a lancé un sort de désarmement, visant à désarmer et non à tuer son adversaire.
De même, lorsque Michael O'Brien affirme que "la prémisse fondamentale du monde de Potter est qu’il n’y a pas d’autre moyen de vaincre Voldemort que d’utiliser les mêmes outils de la mort que lui.",
il oublie complètement tout le développement de l'histoire, dans les tomes antérieurs et dans ce tome final :
. Harry est un moment tenté par la puissance promise par "les reliques de la mort", comme son ennemi ; mais finalement, ce n'est pas de là que viendra le salut ;
. Harry vainc son ennemi, habité d'une foi absolue en sa propre puissance, en renonçant justement à toute puissance.
. plus tôt dans la série, différents moments montrent un Harry tenté par l'emploi des mêmes moyens que son ennemi,
ce dont ses amis le dissuade - et l'aspect mauvais de cette tentation et bon de ce renoncement sont à chaque fois soulignés
(quand il laisse la vie sauve au responsable de la mort de ses parents, quand il refuse de rechercher la mort de ses adversaires, etc...)
De nombreux et non négligeables contre sens, donc, dans cette analyse critique, qui affaiblissent d'autant ses conclusions.
Je m'en vais relire le passage de HP dont vous parlez… A bientôt
effectivement on peut se demander si il a tout simplement lu le livre.
Cela me rappelle ces "talibans" chrétiens qui mettaient le feu aux cinémas qui diffusaient la dernière tentation du christ, résultat un mort bien entendu ces "talibans" n'avaient pas vu le film!
Mais j'ai une grande révélation à vous faire pas plus qu'il n'y a de diables, il n'y a de dieu alors vivez jouissez et que les diables et les dieux se reposent ils ont fait assez de mal comme ça.
Voici venu le temps de la seule créature extraordinaire l’homme!
signé un ex croyant.
Sachez que comme tout bon laïc je respecte la liberté de culte, vous en revanche aurez vous le courage de me publier, après tout je ne fais qu’émettre une opinion!
Eh bien, il ne faut pas beaucoup de courage pour publier un commentaire qui n'est pas en accord avec ce que l'on pense ! Je vois en passant que vous avez un athéisme bien trempé, et bien subjectif me semble-t-il.
Il se trouve que j'ai lu les 7 tomes de Potter. Harry Potter fait en effet des choix qui paraissent chevaleresques, voire sacrificiels, mais il reste que son pouvoir exceptionnel face à Voldemort vient de sa proximité avec lui, puisqu'il le porte même en lui. Beaucoup d'ambiguïtés indiquent l'utilisation d'un symbolisme de substrat : il y a ce que l'on voit au premier abord et tout un luxe de références à des pratiques occultes que Potter maîtrise en tant que sorcier. S'il ne les maîtrisait et utilisait pas, il n'aurait jamais vaincu son adversaire.
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