20 février, 2009

Congé d'accompagnement de fin de vie : danger ?

L’adoption à l’unanimité par l’Assemblée nationale, mercredi, d’une loi prévoyant l’indemnisation d’un congé pris, de droit, pour accompagner un proche mourant, peut certes être considéré comme une « bonne nouvelle ».

Mais la proposition de loi soulève aussi des questions et des inquiétudes, et des interrogations plus générales devant ce qui relève tout de même d’un interventionnisme croissant de l’Etat, dans absolument tous les domaines. N’est-il pas plus urgent de rendre leur liberté aux familles ?
Le bénéfice de ce congé de trois semaines est réservé à « un ascendant, un descendant, un frère, une sœur ou une personne partageant » le domicile d’un patient « en phase avancée ou terminale d’une affection grave ou incurable ». Il ne pourra être accordé qu’à un seul bénéficiaire au titre d’un seul patient.

« Trois semaines » : pas un jour de plus. Et même plutôt moins : l’allocation quotidienne de 49 euros sera versée jusqu’au lendemain du décès effectif. Mme Dominique Orliac, partisane haute en paroles de l’euthanasie, notait pendant les débats que si le patient n’a pas l’à-propos de mourir avant la fin de la période, on est dans les ennuis : comment revenir sur une décision d’hospitalisation à domicile, seule concernée par le congé. Que faire, en effet ? Achever le malade ?

« Phase avancée ou terminale » ? Que veulent dire au juste ces paroles gravées dans la loi ? Si le malade est en phase terminale, on peut sans doute prévoir, à quelques jours près, le décès… Encore que certains s’accrochent à la vie avec la dernière énergie. S’il est en « phase avancée », comment prévoir une mort à 21 jours… à moins qu’elle ne soit programmée ?
Le débat est en réalité celui des soins palliatifs. Mais là encore, il n’est peut-être plus tout à fait celui qu’on croit. Bien sûr, la progression du recours aux soins palliatifs, qui visent à apporter tout le confort possible aux personnes en fin de vie, est une excellente chose, et l’on y a certainement trop peu recours. Pouvoir les administrer à domicile adoucit la mort à plus d’un titre. Mais au vu des débats qui ont précédé l’adoption unanime de la loi, leur définition est en train de glisser.

C’est Gaëtan Gorce, l’un des auteurs de la proposition de loi – et partisan discret de l’euthanasie – qui a vendu la mèche. Plaçant cette affaire sous le signe de « l’appel déchirant de Marie Humbert », il a déclaré à propos de « l’euthanasie » et des « soins palliatifs » : « Nous allons inéluctablement vers un déplacement, voire un brouillage de frontières entre ces deux notions. » Et, plus loin, il salue « notre loi du 22 avril 2005 (loi Leonetti) dont nous pouvons nous honorer, comme en témoigne la terrible affaire qui a récemment agité l’Italie ».

Mais oui, en France il n’y aurait pas eu d’affaire Eluana, puisque la loi autorise l’arrêt de l’alimentation sur une personne qui n’est pas en « phase terminale ».

Et oui encore : aux Pays-Bas, où l’euthanasie est autorisée, sa forme dite « active » est un peu moins employée depuis qu’on a développé des « sédations terminales » qui consistent à cesser l’alimentation en augmentant l’endormissement, protocole qui permet… de programmer la mort en quelques jours.

Il me semble que c’est à cette lumière qu’il faut évaluer la loi sur l’accompagnement des mourants, d’autant que Jean Leonetti s’est ému pendant les débats de ce que pour un Hervé Pierra, « l’arrêt de traitement » (arrêt d’alimentation d’un malade incurable mais dont la vie n’était pas menacée) ait été aussi un « arrêt d’accompagnement ». La « sédation en phase terminale » qu’il souhaite voir développer va décidément bien avec un congé aux contours précis.

Et au coût nul : on économisera sur les frais hospitaliers, sur les arrêts maladie complaisants qui aujourd’hui permettent le plus souvent à un proche s’assister un malade hospitalisé à domicile, et sur les « deuils pathologiques » des proches qui se reprochent de ne pas avoir été là.

Peut-être suis-je trop pessimiste. Mais enfin, alors que les familles sont appauvries par des prélèvements obligatoires qui prennent bien plus de 50% des salaires réels, alors que beaucoup de femmes doivent, du coup, travailler alors que naturellement elles voudraient pouvoir soigner leurs proches, sans dépendre du bon vouloir de l’Etat ou d’une rémunération publique toujours menaçante pour les libertés, n’est-il pas plus prudent de soulever cette question ?

Article paru dans Présent daté du 21 février 2009

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Fin de vie : une allocation pour les aidants familiaux

Comment peut-on allouer une allocation de fin de vie quand on ne connait pas la date de la mort ?

Limitée à 3 semaines ? Ha bon ! Et si le mourant se requinque, on fait quoi ? On interdit un bis repetita ? Faut pas jouer avec les sous de la République comme disent les Guadeloupéens !

Et si le mourant meurt plus tôt, pas le bol !
on pourra quand même toucher les pesos, chef ?

A moins que la chose ne soit infiniment plus perfide :

Et si on pouvait la connaitre, cette date de mort ?
En légalisant l’euthanasie, par exemple ?

 
[]