Synode pan-amazonien : non, les tribus de l'Amazonie ne sont pas de « Bons Sauvages » corrompus par l'Occident (Steve Mosher)
Ce commentaire, nous le devons au sociologue américain Steve Mosher, qui a tenu à réduire à néant ce mythe des tribus « pacifiques » corrompues par l'Occident. Son texte est roboratif.
Steve Mosher est le premier sociologue américain à avoir pu se rendre en Chine pour constater l'œuvre de la révolution culturelle : il était alors athée et pro-avortement. L'assistance à un avortement forcé l'avait bouleversé ; il s'est converti à la religion catholique et, toujours spécialiste de la Chine, a également fondé le Population Research Institute qui lutte contre les entreprises malthusiennes de contrôle de la population à travers le monde.
Je vous propose ici ma traduction rapide de ce texte publié le 13 juin dernier. – J.S.
A l'approche du Synode pan-amazonien de 2019, prévu en octobre, les organisateurs révèlent de pus en plus ouvertement leurs objectifs. Au nom de ce qu'il faudrait apprendre des peuples tribaux d'Amazonie et de leur protection, le synode semble vouloir promouvoir un écologisme radical qui confine au culte de la nature, sans parler d’une présentation romantique des chasseurs-cueilleurs eux-même, promus au rang de Bons Sauvages.
Les peuples autochtones vivant dans le bassin amazonien offrent, selon le Document préparatoire, « modèle de développement alternatif, intégral et solidaire, basé sur une éthique qui inclut la responsabilité pour une authentique écologie naturelle et humaine ». Et surtout, poursuit le document, ils méritent d'être loués pour leur supposée « spiritualité et sagesse » :
« Pour les peuples autochtones d’Amazonie, le “bien vivre” existe lorsqu’ils sont en communion avec les autres personnes, avec le monde, avec les êtres qui les entourent, et avec le Créateur. Les peuples autochtones, en effet, vivent dans la maison que Dieu lui-même a créée et leur a donné en cadeau : la Terre. Leurs diverses spiritualités et croyances les incitent à vivre en communion avec la terre, avec l’eau, avec les arbres, avec les animaux, avec le jour et la nuit. Les anciens sages, appelées indifféremment payés, mestres, wayanga ou chamanes – entre autres – encouragent l’harmonie des personnes entre elles et avec le cosmos » [Pape François, Discours à Puerto Maldonado, NDT].
C’est du lourd. On pourrait presque y voir la description d’une sorte de jardin d'Eden – avant la faute, bien sûr – un jardin peuplé exclusivement de nouveaux Adam et de nouvelles Eve.
Mais la forêt amazonienne est-elle vraiment une sorte de paradis sur terre ? Et les chasseurs-cueilleurs primitifs qui y vivent depuis des siècles – en harmonie avec le cosmos lui-même, nous dit-on – sont-ils réellement les êtres sages et spirituels qu’on nous décrit? Sont-ils plus purs, plus nobles ou tout simplement meilleurs que nous, Occidentaux enténébrés ?
En tant qu’anthropologue ayant vécu dans le monde moins développé pendant de nombreuses années et qui ai visité des peuples tribaux en Papouasie-Nouvelle-Guinée et ailleurs, je dis qu’il y a tricherie.
Certaines parties du Document préparatoire sont vraies ; d'autres sont nouvelles. Malheureusement, les parties qui sont vraies ne sont pas propres aux Amazoniens, alors que les parties qui leur attribuent des vertus nouvelles et uniques sont tout simplement fausses.
Prenons l’affirmation selon laquelle les habitants de la forêt tropicale vivent dans une sorte de « communion » avec le « sol, l’eau, les arbres et les animaux », qui serait unique parmi les peuples. Il est clair que cette attitude générale de respect de la nature n’est pas l’apanage des Amazoniens. Tous les chrétiens croyants sont conscients de vivre « dans la maison que Dieu lui-même a créée et leur a donné en cadeau ».
Je crois me rappeler que c'est un catholique italien, et non un « sage » amazonien, qui a le mieux exprimé cette attitude de louange et d'action de grâce pour les merveilles de la création de Dieu que nous admirons tous. On pourrait penser qu’un Vatican dirigé par un admirateur de saint François le comprenne.
L’affirmation selon laquelle les Amazoniens sont en quelque sorte en droit de revendiquer une vertu unique est tout aussi frauduleuse. Il se peut qu’il y ait d’« anciens sages » – il s’agit invariablement d’hommes, soit dit en passant – qui courent dans la forêt tropicale pour promouvoir l'harmonie des gens entre eux et avec le cosmos (quoi que cela veuille dire), mais l'histoire suggère le contraire.
Lors de leur première arrivée au XVIe siècle, les Européens ont trouvé les tribus amazoniennes dans un état de guerre constante. De « sages aînés » menaient des raids sur les colonies voisines, dans le but de capturer des femmes et des territoires. La pratique du cannibalisme n'était pas rare et fournissait un autre motif pour faire la guerre aux peuples voisins.
Selon une étude réalisée en 2012 par l'anthropologue Robert Walker de l’Université du Missouri, environ un tiers de tous les décès parmi les tribus amazoniennes avant l'arrivée des Européens étaient dus à des conflits violents. « Les mêmes raisons – la vengeance, l'honneur, le territoire et la jalousie à à propos des femmes – qui ont alimenté les conflits meurtriers en Amazonie continuent d’alimenter la violence dans le monde d'aujourd’hui », affirme Walker.
En d’autres termes, les peuples de l’Amazonie, plutôt que d’être des avatars représentant ce que notre nature a de meilleur, étaient frappés des mêmes insuffisances pécheresses que l'humanité en général. Ils n’étaient – et ne sont – ni meilleurs ni pires que nous tous.
Alors, qu’est-ce qui a mis fin à ce cycle mortel de violence et de mort ?
Selon Walker, ce n’est rien d'autre que « la propagation du christianisme et l'imposition de structures juridiques nationales ».
A mesure que les missionnaires européens commençaient à atteindre l’intérieur des terres, le niveau de violence a commencé à baisser, alors que bon nombre de ces tribus primitives ont appris le Cinquième Commandement et se sont converties au catholicisme. Le « tu ne tueras point » a été renforcé par la mise en place de gouvernements nationaux – Brésil, Pérou, Venezuela, etc. – qui fronçaient également les sourcils lorsque les peuples sous leur juridiction s’entretuaient et, dans certains cas, se dévoraient entre eux.
En d’autres termes, ce qui a mis fin à la violence, c’est l'arrivée de la civilisation chrétienne.
Aujourd'hui, les descendants actuels de ces mêmes missionnaires, des prélats comme le cardinal Pedro Barreto, veulent inverser ce processus. Au lieu de continuer à convertir les peuples amazoniens, ils veulent, sous des aspects importants, que le peuple amazonien nous convertisse.
Ce manque d’engagement pour l’évangélisation s’illustre le mieux dans le point de vue des organisateurs du Synode sur ce que l’on appelle « les peuples autochtones en isolement volontaire ». (PIAV). Ce sont des tribus qui se sont retirées dans les endroits les plus inaccessibles de la forêt tropicale afin d’éviter tout contact avec le monde extérieur. On estime à environ 150 le nombre de ces tribus, dont la plupart comptent quelques centaines de personnes.
Le Réseau ecclésial pan-amazonien (REPAM), qui organise le Synode amazonien, a consacré beaucoup de temps et d’énergie à promouvoir le droit de ces tribus à vivre dans un isolement total. De fait, le principal objectif de la réunion du REPAM l’an dernier à Puerto Maldonado, au Pérou, était précisément de discuter de la manière de faire en sorte que les tribus indigènes qui se coupent du reste du monde puissent être « protégées » des contacts avec la société, y compris l'Eglise catholique, afin de « vivre en liberté ».
C’est une prise de position qui me semble très étrange de la part d’un membre de l’Eglise catholique – une Eglise qui existe pour le salut des âmes. Le REPAM soutiendrait-il que saint François Xavier a eu tort d’essayer d'évangéliser la Chine, qui à l'époque préférait vivre dans l'isolement ?
La tâche d’évangélisation qu’impose le « grand envoi en mission » ne souffre pas qu’il y ait des exceptions à ce que l’on appelle à juste titre le « principe d »universalité ». Jésus-Christ n'a pas dit : « Faites de toutes les nations des disciples, mais laissez tomber les peuples qui choisissent de vivre dans l'isolement. »
Pourtant, les organisateurs du Synode amazonien croient apparemment qu’il vaut mieux laisser tranquilles les bons sauvages – pour reprendre l’expression de Rousseau – de la forêt amazonienne. L'idée semble être qu’il vaut mieux les aider à maintenir leur propre identité ethnique, culturelle et religieuse, les rites païens et tout le reste, plutôt que de leur enseigner, à eux et à leurs enfants, la grâce salvifique de l'Evangile.
Il n’est donc pas surprenant que l’aspect de l’Amazonie dont les organisateurs du synode sont particulièrement amoureux est que ses centaines de tribus et de langues différentes en font un paradis « multi-ethnique, multiculturel et multi-religieux ».
On pourrait imaginer que le fait d’être « multireligieux » ne soit pas le genre de chose que des cardinaux catholiques comme Barreto puissent applaudir, puisque l’Église existe pour proclamer « l’unique vraie foi ».
Mais ce n’est plus, apparemment, ce que certains dirigeants de l’Eglise croient aujourd'hui. Si « toutes les religions sont voulues par Dieu », alors il est évidemment ethnocentrique de donner la primauté à la sienne.
Je suppose que nul parmi nous ne devrait en être surpris. Après tout, il est clair depuis longtemps que le principal centre d'intérêt du synode n’est pas du tout la foi catholique, mais plutôt l’élaboration de ce que l’on appelle « une éthique qui inclut la responsabilité pour une authentique écologie naturelle et humaine ».
A la lecture du Document préparatoire, un tel « code éthique » sonne presque comme une religion à part entière.
Pour beaucoup, bien sûr, c'est le cas.
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