06 juin, 2019

Noa Pothoven, la jeune Néerlandaise violée qui s’est laissée mourir de soif (avec l’aide des médecins)


La mort de Noa Pothoven, 17 ans, a fait la une des journaux du monde entier au début de la semaine alors que la presse internationale décrivait l'« euthanasie » de la jeune Néerlandaise à Arnhem, Pays-Bas. Les réactions de choc ont été nombreuses, d'autant plus que sa mort, dimanche dernier, a été associée à de profondes souffrances psychologiques consécutives à des abus sexuels à 11 et 12 ans et à un double viol à l'âge de 14 ans. Il ne s'agissait pas d'une patiente atteinte d'un cancer en phase terminale qui ne supportait plus la douleur physique, mais d'une adolescente dynamique qui avait subi « un sort pire que la mort » quand elle n'était qu'une enfant, et dont la dépression l'avait finalement amenée à refuser la vie elle-même.
Ces réactions étaient saines. Mais l’histoire avait une faille : aucun « fact-checking », fût-il sommaire, n’avait été fait. Les médias « de référence »qui condamnent avec tant d'empressement les « fake news » ont répercuté l'information sans vérifier les sources néerlandaises qui étaient pourtant très claires sur la cause du décès de Noa : elle avait volontairement cessé de manger et de boire,  afin de mourir. Alors ? Il n'y a pas eu d'euthanasie...
Les gros médias ont rectifié leurs reportages, tandis que les agences de vérification ont évoqué des « reportages erronés ou exagérés » aussi bien dans les tabloïds ainsi que de « médias nationaux habituellement fiables », condamnant du même coup leur approche « sensationnaliste ». Certes, Noa Pothoven est morte, mais il n'était plus question d'euthanasie ni même de suicide assisté, donc, probablement, tout allait bien.
Ou non ?
Sa mort était-elle vraiment, au moins d'une certaine façon, « normale », et même « due à des causes naturelles » comme l'indique son certificat de décès ? Sa vie tragiquement abrégée ne soulève-t-elle pas les mêmes questions que l'euthanasie directe d'un mineur ? Mourir de faim avec l'aide de soignants médicaux vaudrait-il en quelque sorte « mieux » que de recevoir une injection mortelle ?
Jusqu'à l'âge de 11 ans, Noa Pothoven était une jeune fille joyeuse, intelligente et heureuse. Elève brillante, elle s'était intégrée sans effort au collège et avait un don pour l'écriture, son activité préférée.
Puis elle est allée à une fête à l'école, où elle a subi des attouchements de la part d’un homme. Un an plus tard, la même chose s'est produite lors d’une autre fête pour adolescents. Encore deux ans, et la jolie jeune fille blonde était violée par deux hommes quelque part à Arnhem. Elle ne l'a jamais dit à ses parents, « par peur et par honte ». Si elle a fini par signaler les faits à la police, plusieurs années plus tard, c’est sans déposer plainte, de peur d’avoir à reparler des actes qu’elle avait subis.

L'entretien de décembre 2018 est par là (en néerlandais)
« Je revis cette peur, cette douleur, tous les jours », a-t-elle dit à un intervieweur de télévision en décembre dernier, à l'âge de 16 ans. « J'ai toujours peur, je suis toujours sur mes gardes. Et encore aujourd'hui, mon corps est toujours sale. Ma maison, mon corps a été cambriolé, et cela ne pourra jamais être défait. »
Noa Pothoven est devenue déprimée et anorexique après les agressions. Elle avait des troubles du comportement et s'automutilait. Plusieurs tentatives de suicide ont suivi et, à un moment donné, elle a été hospitalisée dans un hôpital où elle a reçu une alimentation entérale pendant plusieurs mois et a même été placée dans le coma, en attendant une place dans un établissement psychiatrique spécialisé pour adolescents. Elle a été déplacée d'une clinique à l'autre, ne trouvant jamais le traitement qu'elle espérait pour la sauver de son désespoir.
Lisette et Frans Pothoven n'ont découvert le désir de mort de leur fille que lorsqu'ils sont tombés dans sa chambre sur une enveloppe remplie de lettres d'adieu à ses parents, sa famille et ses amis. Ils n’arrivaient pas à comprendre. « Noa est douce, belle, intelligente, sociable et toujours joyeuse. Comment peut-elle vouloir mourir ? », déclaré sa mère à un journaliste lors de cette même interview télévisée.
Ils n'ont appris les abus sexuels et les viols que leur fille avait subis que lorsque celle-ci avait 15 ans et avait déjà commencé à se priver de nourriture.
Entre-temps, les thérapeutes ont encouragé Noa à écrire sur ses pensées et ses sentiments. Ses écrits se sont transformés en livre, publié en décembre de l'année dernière, Gagner ou apprendre. Elle a expliqué qu'en écrivant, elle s’est rendu compte de plus en plus qu'elle ne voulait plus continuer à vivre. « Oui, l’idée s’est développée lentement », a-t-elle dit au journaliste : « Le sentiment que ce serait peut-être mieux si je n'étais plus là, parce qu'alors les autres ne seraient plus dérangés par moi et je ne le serais plus par moi-même. »
Lors de l'entretien, en décembre dernier, Noa Pothoven expliquait que tout cela l’avait conduite à une « trajectoire d'euthanasie ». On sait qu'elle s'est rendue à la Clinique de Fin de vie qui s'occupe des demandes d'euthanasie que les médecins ne veulent pas honorer ; elle a été refoulée parce qu'elle ne remplissait pas les conditions légales.
Elle s'est plainte de ce que l'euthanasie lui était refusée parce qu'elle était trop jeune : les médecins lui ont expliqué que le cerveau humain est encore en pleine maturation à l'adolescence et que ces demandes pour des raisons psychiatriques ne sont prises en compte qu'après les 21 ans du patient. « Ça m'a vraiment brisée : je ne peux pas attendre si longtemps », a-t-elle dit à la journaliste.
Son histoire se lit comme la chronique d'une mort annoncée. Non seulement Noa voulait mourir, mais le monde entier le savait grâce à son livre. Ce qu'elle avait omis ou craint de dire à sa famille, elle l'a finalement révélé à tous. Des journalistes et des lecteurs ont discuté de sa volonté de mourir. Elle n'a jamais obtenu l'aide et la guérison qu'elle avouait rechercher.
 Elle s'est plainte d'avoir été internée de force dans des établissements psychiatriques par des « personnes en robe de juge » qui lui donnaient l’impression d’être « presque comme une criminelle ».
Noa a-t-elle jamais bénéficié d'une aide spirituelle ? Elle ou ses parents croyaient-ils en une vie après la mort, ou en la justice ultime pour ceux qui souillent les jeunes ? Et ne faudrait-il pas parler d'une forme de complaisance malsaine de la part des médias à l'égard de sa souffrance tragique, suivie jusqu'à ce que, finalement, elle en meure ?
Sa mère, Lisette Pothoven, déclarait en décembre 2018 qu'elle espérait que le fait de rendre l'histoire publique aiderait à trouver une solution, se plaignant qu'il n'y ait pas une seule institution aux Pays-Bas où les besoins, tant psychologiques que physiques, de Noa seraient réellement pris en compte dans un milieu fermé. La jeune fille a été inscrite à plusieurs reprises sur des listes d'attente. Elle était prête à tout essayer, y compris le traitement par électrochocs, qui a finalement été refusé selon une source.
Ses parents espéraient que quelque chose changerait. Dans l'entretien télévisé de décembre 2018, Lisette Pothoven a reconnu avec tristesse que sa fille prenait la voie de choisir sa propre mort : « Nous sommes à son opposé à ce sujet. Nous, ses parents, voulons qu'elle choisisse le chemin de la vie. En réalité, Noa ne veut pas mourir du tout. Elle n'aspire qu'au repos. »
Noa était d'accord : « Oui, je veux me reposer. Je ne veux plus ressentir la douleur. »
On ne peut qu'imaginer comment, quand et pourquoi ses soignants et sa famille ont accepté quelques mois plus tard que la jeune fille « s'abstienne de manger et de boire pour accélérer la mort », comme on dit aux Pays-Bas. Les Pothoven, qui ont été submergés de demandes d'interviews et d'informations par les médias étrangers depuis la mort de leur fille dimanche dernier, ont supplié qu’on les laisse seuls pourqu’ils puissent vivre leur deuil dans la paix.
Ce qui est certain, c'est qu'elle est morte dans un lit d'hôpital installé dans le salon de ses parents, recevant des soins spécifiques pour ceux qui choisissent d'arrêter de vivre en s'abstenant de se nourrir pour mourir de soif et de dénutrition. Il s'agit d'une mort particulièrement horrible, mais elle est ouverte à tous ceux qui le souhaitent aux Pays-Bas, et les soignants sont tenus d'apporter leur aide pendant la procédure.
Remarquablement, cependant, les soignants qui ont des objections de conscience – qu’elles soient émotionnelles, morales ou religieuses – sont autorisés à prendre du recul pour laisser agir des personnes prêtes à « accompagner » une telle « mort choisie », à condition qu'elles donnent des soins en cas d'urgence quand personne d'autre n’est disponible.
Le fait même que l'objection de conscience soit possible dans cette situation montre qu'il ne s'agit pas d'une chose ordinaire et qu'elle soulève de graves questions morales.
En effet, selon les directives officielles de la KNMG (Association Royale des Médecins des Pays-Bas), « s'abstenir consciemment de manger et de boire » pour hâter la mort (ou dans le cas de Noa, pour la provoquer rapidement et directement) est « explicitement découragé » avant 60 ans lorsque le patient ne souffre pas d'une « maladie en phase terminale ».
Pour les personnes de plus de 60 ans, en revanche, cette exigence n'existe pas et toute personne peut demander de l'aide en vue de ce choix de fin de vie, sur le fondement de "l'autonomie du patient", l'idée étant que tout patients est en droit de refuser les traitement, les soins et les soins ordinaires comme ils le souhaitent. « C'est un choix que tout le monde a le droit de faire et peut faire », affirment les directives de la KNMG.
Ce document de 64 pages constitue une lecture intéressante et même terrifiante. Bien que les médecins et les autres soignants soient encouragés à dissuader les patients de choisir d'arrêter de recevoir nourriture et liquides et à rechercher des solutions qui les aideront à continuer à vivre, les directives suggèrent que la procédure peut être l’alternative proposée lorsque l'euthanasie est refusée.
Ils ajoutent que les patients souffrant de dépression ne devraient pas être empêchés, à ce titre, de choisir un tel décès parce qu'ils sont encore capables de prendre leurs propres décisions en connaissance de cause.
Aucune mention n'est toutefois faite des patients mineurs. Dans le cas de Noa Pothoven, il n'est pas clair si ses parents ont été amenés à signer les documents demandant la procédure pour leur fille mineure, mais ils étaient certainement d'accord avec elle. Sous quelle pression ? Et quel a été le rôle joué par la mentalité euthanasique qui s'est infiltrée si profondément dans la société néerlandaise ?
Les directives officielles prennent soin d'expliquer que le fait de « s'abstenir consciemment » de manger et de boire ne peut pas être considéré comme une euthanasie ou un suicide assisté, car le processus est lent et peut être arrêté si le patient décide que c'est trop difficile de tenir, ou qu'il décide de continuer à vivre malgré tout.
Mais ce sophisme est difficile à accepter. On est certainement face à une décision de mettre fin prématurément à une vie. Dans le cas d'une jeune fille anorexique et dépressive, le refus de manger est au cœur de sa maladie mentale et la responsabilité morale, si elle existe, est difficile à évaluer. Les proches peuvent être amenés à accepter la chose lorsqu'ils sont à bout de désespoir, à la recherche d'une aide qui n'arrive pas. Mais cela ne rend pas leur décision objectivement correcte.
D'autre part, la coopération active des médecins, des infirmières et des soignants est beaucoup plus discutable. Les directives de la KNMG les dégagent de toute responsabilité en assimilant la procédure au refus de la ventilation artificielle, de la chimiothérapie, des antibiotiques et d'autres types de traitement dont le retrait entraînerait finalement la mort. Cet argument repose sur la confusion entre traitement médical et soins ordinaires qui sont toujours dus au patient.
Un deuxième argument indique clairement que la procédure requiert de la part des soignants des actes qui ne sont pas en relation directe avec la « mort accélérée » du patient. C'est vrai. Soulager la douleur, prendre soin des symptômes si épouvantables de la mort par déshydratation, s'assurer que le patient n'est pas mal à l'aise et même de lui administrer une sédation palliative (aussi légèrement que possible quand cela devient nécessaire pour soulager la souffrance, affirment les directives) ne sont pas des actes qui provoquent le décès.
Mais il est difficile de ne pas les voir comme faisant partie du suicide, aussi lent soit-il. Cela revient certainement à ne pas aider une personne qui est en péril de mort. Mais l'idée est de tolérer une alternative à l'euthanasie et au suicide assisté, qui n'a pas tout à fait l’allure brutale de ces deux crimes objectifs.
Les directives de la KNMMG donnent de nombreux détails techniques sur les problèmes et les douleurs et souffrances spécifiques à le type de mort que Noa a choisi de provoquer. La soif terrible est l'un des symptômes, et plus le patient est jeune, plus elle est ressentie. L'insuffisance organique, la constipation, l'impossibilité d'uriner, l’affaiblissement des muscles ne sont que quelques-uns des effets de l'arrêt de boire et de manger.
Souvent, le délire s'installe. Les lignes directrices soulignent que dans leur confusion, les patients mourants commencent parfois à mendier de l'eau. Ils indiquent clairement qu'il est très important que les membres de la famille et les soignants ne cèdent pas à la supplication du patient, parce que celui-ci ne peut plus à ce moment-là exprimer valablement sa volonté consciente de boire et parce que le fait de donner des liquides empêcherait le décès que le patient souhaite.
 Les médecins sont encouragés à expliquer cela à leurs patients et à leur faire signer des formulaires précisant qu'à aucun moment ils ne doivent recevoir des liquides, même s'ils en font la demande lorsqu'ils sont jugés incapables d'exprimer leur volonté de façon valide.
Selon la même logique, la sédation palliative peut être appliquée sans le consentement du patient, bien que sa famille puisse être consultée à ce sujet.
Comment tout cela est-il censé être humain et « digne » ? En quoi une telle procédure n'est-elle pas une aide délibérée à mourir fournie à une personne vulnérable ?

Et qui donc pense à l'âme immortelle de Noa Pothoven ?




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