02 décembre, 2016

Cardinaux des “dubia” : Mgr Pio Vito Pinto revient à la charge

Non content d’avoir déclenché la controverse, à peine tempérée par un rectificatif qui laisse beaucoup de questions ouvertes (voir ici l’article de ce blog sur le rectificatif), Mgr Pio Vito Pinto a redoublé d’agressivité à l’égard des quatre cardinaux et de leurs Dubia adressés au pape François, dans un entretien avec le site de l’Eglise catholique allemande Katholisch.de. Le doyen de la Rote romaine y choisit des termes très durs pour dénoncer ces quatre cardinaux qui n'ont fait qu’exprimer leurs graves inquiétudes à propos d’Amoris laetitia qui pourrait bien enseigner aux fidèles des doctrines contraires à l'enseignement catholique traditionnel.
Je transcris son propos à partir de la traduction vers l’anglais réalisé par www.onepeterfive.com, et reprends quelques-uns des commentaires de l’auteur de l’article, Maike Hickson.
« Ils ont écrit au pape et cela est correct et légitime. Mais faute de réponse après quelques semaines, ils ont publié l’affaire. C’est une claque en pleine figure. Le pape peut choisir de prendre conseil auprès de ses cardinaux ; mais c’est quelque chose de très différent que de lui imposer un conseil. »
Le journaliste allemand a fait remarquer que les quatre cardinaux diraient alors ne pas avoir le choix. Mgr Vito Pinto répond :
« Ils ne forment pas un conseil qui ait une quelconque compétence. Au contraire, en tant que cardinaux, ils sont encore davantage liés par un devoir de loyauté à l’égard du pape. Il représente le don de l’unité, le charisme de Pierre. Voilà pourquoi les cardinaux doivent le soutenir, et non le gêner. De quelle autorité les auteurs de la lettre agissent-ils ? Du fait qu’ils sont cardinaux ? Cela ne suffit pas. Je vous en prie ! Évidemment ils peuvent écrire au pape et lui envoyer leurs questions, mais l'obliger à répondre et publier l’affaire, c’est autre chose. »
Au mépris des faits, Mgr Vito Pinto insiste pour dire que le document du pape trouve sa source dans les travaux des deux synodes des évêques et dans les questionnaires diffusés à travers le monde. Il affirme :
« La majorité absolue du premier synode, et une majorité des deux tiers au second, où les membres des conférences épiscopales étaient présents, ont exactement approuvé ces thèses désormais contestées par les quatre cardinaux. »
La remarque est intéressante, car elle sous-entend que la réponse du pape aux Dubia des cardinaux ne serait pas allée dans leur sens.
Mgr Pinto insiste ; le pape « ne force pas, encore moins il ne condamne », déclare-t-il à Katholisch.de : « certains évêques ont putativement des difficultés, d’autres font semblant d’être sourds. »
On lui demande alors si le pape pourrait reprendre leurs chapeaux rouges aux quatre cardinaux. Réponse :
« Je ne suis pas du genre qui peut menacer. Ecrire une telle chose est vraiment une licence journalistique, ce n’est pas sérieux. Ce que j’ai dit c’est plutôt : François est un phare de miséricorde et il a une patience infinie. Pour lui, il s’agit d’être d’accord, et non de forcer. C’est un acte grave par lequel ces quatre ont publié leurs lettres. Mais penser qu'il pourrait leur enlever leur cardinalat – non. Je ne crois pas qu’il le fera. (…) En soi, en tant que pape, pourrait faire une telle chose. Tel que je connais François, il ne le fera pas. »
Interrogé sur la correction formelle du pape que le cardinal Burke présentera si nécessaire, Pinto se fait véhément :
« C’est insensé. Il ne pourrait pas exister un conseil de cardinaux qui puisse demander des comptes au pape. La tâche des cardinaux est d’aider le pape dans l’exercice de son office, et non de le gêner ou de lui donner des préceptes. Et ceci est un fait : François n’est pas seulement en plein accord avec la doctrine, mais aussi avec tous ses prédécesseurs du XXe siècle, et c’était un âge d’or avec d’excellents papes – à commencer par Pie X. »
A propos des quatre auteurs, Mgr Vito Pinto s’en prend principalement au cardinal allemand Meisner :
« Je suis choqué, spécialement en raison du geste de Meisner. Meisner était le grand évêque d’un important diocèse – que c'est triste de le voir mettre avec cette action une ombre sur son histoire. Meisner, un grand guide spirituel ! Qu'il en arriverait là, je ne ne m’y attendais pas. Il était très proche de Jean-Paul II et de Benoît, et il sait que Benoît XVI et François sont en plein accord quant à l’analyse et aux conclusions à propos de la question du mariage. Et Burke – nous avons travaillé ensemble. Il me semblait être une personne aimable. Maintenant je lui demanderais : votre éminence, pourquoi avez-vous fait cela ? »
La conclusion est à l’avenant :
« Priez un peu plus, restez calmes, basta. Officiellement cette action n’a pas de valeur. L’Eglise a besoin d’unité, et non de murs, dit le pape. Nous savons comment est François. Il pense que les gens peuvent se convertir. Je sais qu’il prie pour eux. »
L’unité sans la vérité, en somme.
Ou alors une vérité mouvante, impossible, puisque de tout cela il ressort que les choses ont bien changé et qu’il n’est demandé aux cardinaux que de se soumettre en faisant fi du principe de non contradiction : une même chose ne peut pas, en même temps et sous le même rapport, être et ne pas être dans un même sujet.

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1 commentaire:

@sylaene a dit…

François n'a rien changé à la discipline des sacrements. Qu'il soit en plein accord avec Benoit XVI et tous les papes du XXème siècle sur ce sujet, comme l'admet Mgr Pio Vito Pinto le confirme et montre que les conditions d'accès aux sacrements des divorcés remariés n'ont pas changé. Il semble donc que le pape soit entouré par des personnes comme Mgr Pio Vito Pinto ou comme Antonio Spadaro s.j. qui cherchent à favoriser et promouvoir une lecture laxiste d'AL. On le voit par exemple ici : https://cruxnow.com/interviews/2016/12/04/jesuit-close-pope-says-many-attacks-amoris-result-bad-spirit/ Mais le texte d'AL lui-même n'encourage pas au laxisme.
@sylaene

 
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