L’offensive pour faire de l’avortement un « droit de l’homme » – tout comme celle de faire du « mariage » gay un droit de l’homo – progresse discrètement dans le monde, avec une insistance particulière ces temps-ci sur l’Amérique latine. Normal : la religion catholique y demeure majoritaire, c’est donc un bastion à faire tomber. Et si possible, de manière sournoise, en profitant de faits divers frappants pour augmenter le nombre d’exceptions légales à la pénalisation de l’avortement et pour venir, lentement mais sûrement, à bout de l’opposition de l’Eglise.
L’Argentine a ainsi vécu depuis le début de l’année au rythme médiatique d’affaires de jeunes filles violées – si possible de manière incestueuse – et enceintes, qu’ont soutenues des associations féministes pour leur faire obtenir un avortement « légal ». A la faveur de ces affaires, on a vu fleurir au printemps des propositions de loi de légalisation, mais le plan de libéralisation de l’avortement sait être plus subtil.
On a donc vu paraître il y a quelques semaines, apparemment avec l’aval des autorités, un guide d’application du code pénal fédéral argentin qui élargit considérablement le champ des « exceptions ». Le fameux article 86 prévoit une absence de peine en cas de danger pour la vie de la mère ou lorsque la grossesse résulte d’un viol sur une femme déficiente mentale – exception qui est déjà en voie d’être étendue à toutes les grossesses résultant de viol par le jeu des affaires médiatisées.
Cette tactique est finalement celle qui a toujours été employée selon des figures diverses : des cas les plus extrêmes – viol, danger de mort, très grave malformation fœtale – on passe au danger pour la santé, physique ou psychique, à la détresse avérée aux difficultés économiques. Pour aboutir au « droit » pur et simple, fût-il limité par des considérations de délais fixés par la loi. L’avantage du système, c’est évidemment de faire passer pour des « inhumains » ceux qui apparaissent comme refusant de prendre en compte la situation de la femme enceinte. Et cela explique même que – en France par exemple – ceux qui devraient être en première ligne hésitent à monter au créneau, cherchant simplement à limiter les dégâts plutôt que de se battre sur le plan des lois : le plan politique.
En Argentine, on ne peut faire ce reproche à l’Eglise. Et même, pour ce qui est de l’incident le plus récent, il faut saluer la récente intervention télévisée, lucide et nette, de Mgr Hector Aguer, archevêque de La Plata. Elle est riche d’enseignements, aussi, pour le Vieux Monde. En voici la retranscription, dont je vous propose la traduction.
Le mois dernier, il s’est produit un incident très confus : la publication d’un guide technique du ministère de la Santé de la Nation pour la prise en compte intégrale des avortements non punissables. Je dis que ce fut une affaire confuse parce que l’instrument en question a apparu comme une résolution du ministère de la Santé ; mais peu de temps après M. le ministre a précisé qu’il n’avait d’aucune façon autorisé sa publication et qu’il n’était pas dans ses intentions, donc, de promouvoir l’avortement tel que cela était proposé dans ce funeste guide.
Mais il est curieux de noter que le texte a été préparé par des experts techniques du ministère de la Santé. Je crois que c’est sous la responsabilité du gouvernement précédent. Ce document se permet d’interpréter le Code pénal de la nation, en ce qu’il prétend étendre le champ des deux excuses absolutoires qui se trouvent dans l’article 86.
Cet article du code pénal considère l’avortement comme un délit, mais il considère que celui-ci n’est pas punissable lorsque la grossesse, et l’avortement subséquent, se sont produits à cause du viol d’une femme déficiente mentale, ou lorsqu’il y avait un danger pour la vie de la femme enceinte.
Aujourd’hui le Guide étend ces deux excuses absolutoires en présentant l’avortement comme un droit. Il dit clairement que l’avortement est un droit humain de la femme. C’est même le titre du Guide qui le présente ainsi : “Mise en œuvre effective des droits sexuels et reproductifs.”
Cela fait longtemps que l’on cherche à introduire dans la société argentine cette mentalité abortive qui présente l’élimination d’un être humain en gestation comme un droit de la femme.
Il est à noter que ce Guide, où l’on décrit par le menu les cruelles méthodes utilisables pour assassiner des enfants de 12 semaines de gestation et davantage, ne mentionne jamais l’enfant à naître, comme si celui-ci n’était qu’un simple objet biologique, un animal pré-humain ou une chose bizarre qui aurait fait irruption à l’intérieur la femme, pour dire les choses de manière grossière.
En outre, on essaie de promouvoir cette mentalité parmi les jeunes, puisque précisément ce Guide prévoit la possibilité pour une jeune fille mineure de se présenter pour un avortement sans que ses parents ne s’en rendent compte.
Eh bien, que cet accroc se soit produit au ministère de la Santé n’a rien d’un hasard. Heureusement, M. le ministre s’est dérangé pour préciser que ce n’était pas son intention de promouvoir cela. Mais le document, quoi qu’il en soit, a tout de même été publié. D’autre part cette initiative répond à un plan qui se développe de manière progressive. Il existe un décret, portant le n° 1086 de l’année 2005, qui approuve le Plan national contre la discrimination, qui inclut l’avortement au nombre des choses qui ne doivent pas faire l’objet de discrimination. Comme si l’on se rendait coupable de discrimination envers la femme en « l’obligeant » à avoir son enfant.
Dans cette décision présidentielle remontant à 2005 il faut voir la manifestation d’un plan qui n’a rien d’une invention argentine, mais qui est la retranscription servile d’un projet global de mise en place imposée de nouveaux paradigmes, visant à faire régner dans le monde entier la dictature du relativisme. C’est-à-dire : tout se vaut, il n’y a pas de distinction entre le bien et le mal par rapport à la nature humaine. Et, au nom d’une sorte de religion laïque des droits de l’homme, on nie le droit fondamental à la vie, sans lequel tous les autres se délitent. Ce qui jusqu’à présent constituait un délit est en passe de devenir un devoir.
J’insiste : il s’agit d’un enfant, puisque selon l’interprétation que notre pays a fait de la Déclaration des droits de l’enfant, c’est ainsi que l’on considère un être humain depuis l’instant de sa conception. Malgré cela une députée s’est fendue récemment d’une incroyable élucubration : selon elle, on n’est enfant qu’à partir de la naissance. Cette affirmation contredit les certitudes incontestables de la biologie. L’enfant possède une identité propre, personnelle, depuis la conception.
Il faut rester en alerte devant ces tentatives, car en outre, devant le Congrès de la nation, comme on le sait, divers projets sur la même ligne sont régulièrement renouvelés, afin d’introduire l’avortement, qui finira par être généralisé à partir de cette extension des excuses absolutoires du Code pénal.
Pour (triste) mémoire : la Cour de cassation française considère que seul un bébé ayant respiré après sa naissance doit être considérée comme un enfant, selon la jurisprudence qui a refusé de prendre en compte le dommage causé à une femme dont le bébé était mort à neuf mois de grossesse lors d’un accident de la route.
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