14 janvier, 2007

L'évêque de Fatima prêche pour la vie

Merci au Salon beige qui signale le pèlerinage pro-vie qui s’est déroulé à Fatima pour le premier « treize » de l’année à l’approche du référendum portugais sur l’avortement . Après la messe du vendredi soir, une nuit d’adoration pour le respect de la vie a réuni plusieurs centaines de personnes. Samedi 13 janvier, le nouvel évêque du lieu (ancien élève et ami de Benoît XVI), don Antonio Marto, a prononcé l’homélie qui suit. Elle mérite à mon sens d’être connue et j’en propose cette rapide traduction.

Soyez les sentinelles de la dignité et de l’avenir de la vie

Vous êtes bénie, et le fruit de vos entrailles est béni !

L’Evangile d’aujourd’hui offre à notre contemplation le mystère joyeux de la Visitation de Notre Dame à sa cousine Elisabeth. C’est le mystère de la communication et de l’accueil mutuel entre deux femmes enceintes et entre trois générations (Elisabeth, plus âgée, Marie, plus jeune et les enfants à naître).

Chacune de ces femmes porte avec elle un secret difficile à communiquer et en même temps, difficile à tenir caché : le secret le plus intime et le plus profond dont une femme puisse faire l’expérience sur le plan physique-psychique : l’attente d’un fils.

Marie se dirige « en hâte » à la rencontre d’Elisabeth, non seulement pour aider mais aussi pour recevoir de l’aide. Quand les deux femmes se rencontrent, il se produit une explosion de joie.

Elisabeth entendit la salutation de Marie et immédiatement l’enfant tressaillit en son sein. Sur un bas-relief de la sainte maison de Lorette, nous pouvons contempler l’affectueuse étreinte et une salutation pleine de tendresse et de profond enthousiasme, disant pour ainsi dire : « Courage ! Je te comprends. N’aie pas peur ! Moi aussi je m’apprête à avoir un enfant. »

Elisabeth se sent comprise au plus profond d’elle-même et sa crainte se transforme en joie. Au même moment, elle comprend le secret de Marie : « Tu es bénie et le fruit de tes entrailles est béni », ou, d’une autre façon : « Tu es bénie et le Seigneur qui se manifeste dans le fruit de tes entrailles es béni : » Marie aussi se sent comprise, accueillie, reconnue, aimée.

Et du registre humain, elles passent à la communication de la foi qui les unit et à la louange pour les dons que Dieu réalise en elles et à travers elles. Elles contemplent leur mission de femmes et de mères et celle de leurs fils à la lumière du grand dessein de Dieu en faveur de l’humanité.

Voici donc deux femmes qui se rencontrent dans la perspective de la construction de la vie et du service de l’humanité.

Contempler la merveille et le mystère de la vie humaine naissante

Ce cadre de la Visitation est un appel à contempler et à méditer la merveille et le mystère de la vie humaine naissante. Qui ne voit ici reflétée, en un sens, cette expérience unique vécue par les parents qui engendrent un enfant ? Depuis la profonde émotion, quand la mère se rend compte de sa grossesse, à l’accompagnement de la gestation où elle sent les battements du cœur et les premiers mouvements de l’enfant, jusqu’au mélange d’angoisse et d’espérance alors qu’approche l’accouchement ; et pour finir, le sentiment d’émerveillement et d’étonnement quand ils se penchent sur lui, le contemplent et se trouvent face à ses traits uniques, qui grandirent cachés dans le sein maternel et voient aujourd’hui la lumière du jour.

Même en sachent qu’il est le fruit de leur fécondité et de leur amour, les parents accueillent l’enfant comme un don confié à leur sollicitude, et non comme une chose ou un objet dont ils seraient propriétaires et dont ils pourraient disposer arbitrairement.

Quel est le secret ultime de cette nouvelle vie orientée vers l’épanouissement dans la fleur de la conscience et la gloire de la liberté ? A la lumière de la foi chrétienne, la génération de l’être humain plonge ses racines dans le mystère de Dieu Créateur, source de toute vie. Ce n’est pas le simple produit du hasard irrationnel, et dépourvu de sens, de l’évolution. Elle porte en elle la marque de la créature « à l’image de Dieu ». « Chaque enfant qui naît nous apporte le sourire de Dieu et nous appelle à reconnaître que la vie est un don venant de Lui, à accueillir avec amour et à protéger toujours et à chaque instant » (Benoît XVI).

N’importe quel homme ou femme de bonne volonté, même s’il ne croit pas, a l’intuition que dans la vie humaine qui naît il y a une valeur sacrée, qui inspire le respect et peut être perçue à la lumière de la raison. Un non-croyant comme Umberto Eco affirme : « J’estime que la naissance d’un enfant est une chose merveilleuse, un miracle naturel que nous devons accepter ! » Et dans cette même logique, un autre philosphe italien, Norberto Bobbio, laïc et socialistr, affirme que la défense de la vie humaine, avant et après la naissance, est « une cause progressiste, démocratique et réformiste » qu’il ne faut pas laisser aux seuls croyants.

L’acceuil, le soin et la protection de l’enfant dans sa gestation et de la mère qui l’engendre

Nous constatons avec satisfaction que la sensibilité s’accroît en ce qui concerne la protection des enfants, des conditions dignes pour la maternité, et l’égalité entre les êtres humaine, et la défense et la protection de l’environnement. En même temps croît dans le monde entier l’opposition à la peine de mort et à la torture. Mais, paradoxalement, nous assistons à une banalisation croissante de l’avortement qui provoque la mort silencieuse d’un être humain silencieux, sans défense et innocent.

Pourquoi cette dévalorisation de la vie humaine naissante, sur l’échelle des valeurs ? Comment a-t-il été possible dans notre culture, qui se réclament autant d’humanisme, de mettre la liberté humaine en opposition avec la vie humaine ? Pourquoi cette distinction discriminatrice entre êtres humains déjà nés et les enfants à naître, en gestation ? Pourquoi ne nous arrêtons-nous pas dans la contemplation et la réflexion devant le moment lumineux du commencement de la vie humaine que les nouvelles techniques mettent aujourd’hui devant nos yeux ? Pourquoi ce contraste impressionnant entre un grand intérêt pour l’écologie de la nature et le peu d’intérêt pour l’écologie de la vie de l’être humain à l’état d’embryon ? Ce sont des interrogations qui donnent à penser !

Le phénomène de l’avortement comme plaie sociale est le symptôme d’un mal-être plus profond de la culture et de la civilisation, de la société elle-même. Il désigne une vision matérialiste qui réduit le concept de vie humaine à un simple produit ou matériau biologique ; c’est une vision pragmatico-utilitariste qui relègue absolument la sensibilité morale au-delà des frontières des coûts, du bien-être, du confort, etc. Et alors, notre société devient simultanément fragile (face aux problèmes de la vie) et « dure » (dans les solutions drastiques) en fonction d’une logique utilitariste et concurrentielle.

Nous n’ignorons pas, nous ne pouvons ignorer que souvent, la décision d’avorter est le fruit de grandes souffrances et angoisses (sans oublier les pressions), et qu’elle est un véritable drame pour beaucoup de femmes. Mais nous pensons qu’à un drame on ne doit pas répondre par un autre drame : celui de détruire une vie humaine qui se développe et qui est l’élément le plus fragile de tout ce processus. La réponse véritablement humaine et humaniste à ce drame est un projet solidaire, galvanisant toutes les ressources de la société civile et de l’Etat, pour offrir toute la sollicitude, tout l’accueil et la protection d’ordre social, économique et psychologique aussi bien à l’enfant à naître qu’à la mère qui l’engendre. Nous ne pouvons considérer l’un sans l’autre ; et encore moins opposer l’un à l’autre. La libéralisation de l’avortement, même maquillée sous la forme juridique de la dépénalisation, n’est pas la réponse digne et juste. C’est une fuite en avant, pour ne pas attaquer le problème à la racine. Ce n’est pas un chemin de progrès, d’avenir et de liberté.

Tout cela exige un sursaut et une mobilisation des consciences pour une Nouvelle Alliance entre la Liberté, la Vie et l’Amour – indissolublement unis – et pour une action solidaire. Comme le dit le poète latino-américain Oscar Campana :

S’il n’a pas un chemin qui nous porte,
Nos mains l’ouvriront ;
Et il y aura de la place pour les enfants,
Pour la vie et la vérité,
Et ce lieu sera à tous
Dans la justice et la liberté.
Si quelqu’un se lève, écoutez,
Nous serons deux pour commencer !

Que cet appel du poète éveille, dans la société et dans les communautés chrétiennes, la volonté de donner une aide concrète aux femmes qui se trouvent dans des situations dramatiques et donner un accueil aux bébés qui naissent dans des situations défavorables.

Avec humilité, mais fermement, nous continuerons de proclamer la valeur immense de la vie humaine. La défense de la vie avec les moyens de la paix, avec conviction et par le témoignage, avec les moyens d’une démocratie plurielle, est une dette d’honneur pour l’avancée de notre civilisation ordonnée à un humanisme intégral et solidaire. A vous tous je confie, donc, une mission : soyez les sentinelles de la dignité et de l’avenir de la vie humaines dans toutes ses phases et dans toutes les circonstances, depuis son premier instant jusqu’à sa mort ! N’ayez ni peur ni honte d’être les champions de la sympathie, de l’estime et de l’amour pour toute la vie humaine !

Sainte Mère du Rédempteur et Mère spirituelle de l’humanité :

Nous t’adressons avec confiance notre prière, pour que se développe dans les consciences, surtout sur notre continent européen, le respect sacré pour la vie de chaque être humain, dans toutes ses phases, depuis son premier instant jusqu’à sa mort.

L’Evangile nous dit que, à ta salutation, l’enfant tressaillit de joie dans le sein d’Elisabeth.

Nous nous demandons devant toi : les enfants d’Europe tressaillent-ils de joie dans le sein de leurs mères ?

Sautent-ils tous de joie avec l’espérance d’une vie qui naît de l’amour qui les accueille, de la tendresse que les reçoit ? Qui reçoit même ceux d’entre eux qui pourraient venir au monde avec difficulté, dans des situations difficiles pour la famille.

Est-elle présente chez les enfants d’Europe, qui se trouvent dans le sein maternel, cette espérance que nous leurs préparons un avenir d’amour, d’accueil, de paix ?

C’est cela qui trouble notre courage, ô Marie, que de penser à cette Europe qui vieillit, à cette société faste mais désenchantée, qui a peur de vivre et de donner la vie.

Fais, ô Mère, que ce tressaillement de joie dans le sein maternel soit pour tous un tressaillement d’espérance et de confiance en l’existence d’une humanité bonne, saine et courageuse ; en l’existence de pères et de mères capables de recevoir les enfants avec amour ; qu’il y ait, là où se trouve une situation difficile, aussi des communautés chrétiennes et des sociétés disposées à prendre soin de l’avenir de ceux qui vont voir la lumière du jour.

Fais, ô Marie, que l’Europe ne regarde pas seulement vers le passé, qu’elle ne pense pas seulement à survivre dans un monde de vieux, mais qu’elle dirige ses yeux, avec joie, confiance et générosité, vers un avenir plein de nouvelles vies humaines.

Et pour cela, ô Marie, enseignez-nous à vivre notre vie avec sérénité ; à faire joyeusement les sacrifices quotidiens, à accepter avec joie les petits renoncements qui trempent le corps et l’esprit et donne du goût à l’existence ; à être solidaires avec ceux qui souffrent les angoisses de la vie.

Nous nous confions à toi, nous voulons nous laisser conduire par toi ; ton Cœur tendre et maternel, ton Cœur Immaculé nous inspirera d’aimer, de protéger, de défendre et de servir la vie, la paix et la justice dans toute l’humanité. Amen !

Antonio Marto, évêque de Leiria-Fatima, Sanctuaire de Fatima, 13 janvier 2007.

Source : ici .

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Merci d'avoir traduit cette homélie de notre Êveque de Fatima. Ces jours-ci un enjeu vital pour l'âme de notre peuple devra être conquis de haute lutte. La solidarité et la prière de nos frères Français nous sont précieuses. Merci.
Ines

Anonyme a dit…

Monseño Antonio Marto, hombre cabal

 
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