17 juin, 2013
Le pape François, lors d’une conversation à bâtons rompus avec l’équipe dirigeante de la CLAR (Confédération latino-américaine des religieux et religieuses) le 6 juin, a fait quelques déclarations explosives qui ont été consignées de mémoire par les participants et rapportées sur le site progressiste reflexionyliberacion.cl. Au cours de la rencontre, très décontractée – le pape était au milieu de ses visiteurs pour leur parler « comme un simple frère », ont-ils dit – il a évoqué l’existence d’un « lobby gay » au sein de la curie.
« Dans la curie, il y a des gens saints, en vérité, des gens saints. Mais il y a aussi un courant de corruption, il y a cela aussi, c’est vrai… On parle du “lobby gay”, et c’est vrai, il est ici… Il faut voir ce que nous pouvons faire… »
La CLAR a publié un communiqué jeudi regrettant la publication de ces propos rapportés de mémoire à usage interne et souligné que seul leur sens général est exact. Cela permet néanmoins de s’interroger sur la grave accusation que porte le pape François contre un réseau dont les membres n’ont pas été identifiés.
Son affirmation, ou en tout cas sa teneur, ne tombe pas comme un coup d’éclair dans un ciel serein. On évoquait l’existence de réseaux gays à propos du rapport remis en février à Benoît XVI après l’enquête menée par trois cardinaux à la retraite, à sa demande : Julian Herranz, Jozef Tomko et Salvatore De Giorgi. Le premier d’entre eux l’aurait évoqué avec le pape en octobre dernier, parlant d’un « réseau transversal uni par l’orientation sexuelle ». Il est vrai que cette « fuite », réelle ou supposée, a été orchestrée par un journal de gauche, peu favorable aux catholiques, La Repubblica. Et que, par conséquent, il fallait la prendre avec prudence.
Il est frappant aussi que le pape François, qui n’est pas né de la dernière pluie et qui multiplie depuis son élection les avertissements plus ou moins directs, mais toujours vifs, à l’intention d’une part de la hiérarchie vaticane – pointant le carriérisme, l’amour de l’argent, l’esprit fonctionnaire… – a choisi un cénacle plutôt marginal pour lancer cette accusation gravissime.
Pourquoi ? Lui seul le sait. On peut simplement noter que le propre des lobbies contemporains est d’être riches, puissants, installés, forts de leur discrétion mais également habiles dans la manipulation de l’opinion. Noter aussi que le pape François a certainement voulu faire passer un message.
A l’heure où la France découvre le niveau qu’atteint la persécution politique, légale, policière et judiciaire à l’égard de ceux qui ne partagent pas l’« homo-hérésie », on comprend un peu mieux l’insistance de certains cardinaux romains à dire que la défense de la vie et de la morale naturelle pourraient bientôt conduire ses protagonistes vers une forme de martyre, voire au martyre. Ce fut le cas par exemple du cardinal Comastri appelant les participants à un congrès pour la vie à Rome, en 2010, à trouver le « courage des martyrs » pour témoigner de l’Evangile de la vie. Et il y eut d’autres occurrences.
Cette forte préoccupation affirmée par certains princes de l’Eglise, et les actes posés par Benoît XVI durant son pontificat dans le cadre du scandale des prêtres pédophiles, donne à tout le moins une idée de la puissance des lobbies de la culture de mort.
Quel rapport ? direz-vous. Un début de réponse est donné par un prêtre polonais qui a enquêté longtemps sur ce qu’il appelle le « lobby gay » dans l’Eglise, et il établit d’emblée le lien entre la présence de clercs homosexuels et l’affaire des prêtres pédophiles, en notant que 80 % des affaires concernent des relations avec des garçons pubères ou adolescents : l’éphébophilie, qui est une variante de l’homosexualité masculine. Et il note que cet aspect du scandale a été largement passé sous silence. C’est lui, le P. Dariusz Oko, qui témoignait dans une interview à la presse italienne traduite et citée par benoit-et-moi.fr, de l’existence de cette « homo-hérésie » soutenue par un important groupe de théologiens « qui rejettent l’enseignement de l’Eglise sur l’homosexualité », n’acceptant pas « que la tendance homosexuelle soit un trouble de la personnalité ». Et d’ajouter que certains théologiens, à l’abri de leur chaire dans des universités catholiques, enseignent sans encombre l’idéologie du genre.
L’animatrice du site benoit-et-moi faisait alors le rapprochement entre cette interview publiée dans la presse italienne le 21 décembre dernier et les vœux de Noël de Benoît XVI qui, peu de jours plus tard, dénonçait « l’attaque, à laquelle nous nous trouvons exposés, contre la forme authentique de la famille composée du père, de la mère et des enfants ». Il visait explicitement l’idéologie du genre, le « “gender” (…) présenté comme une nouvelle philosophie de la sexualité. Le sexe, selon cette philosophie, n’est plus un fait originel de la nature que l’homme doit accepter et remplir personnellement de sens, mais un rôle social que l’on décide de façon autonome », disait Benoît XVI. « A cette occasion, les observateurs les plus attentifs ont souligné que les paroles vibrantes de Benoît XVI étaient adressées aussi à l’intérieur de l’Eglise, à l’intérieur même de la curie », notait benoit-et-moi.
Une longue étude du P. Oko sur l’étendue et la puissance du lobby gay au sein même de l’Eglise a été publiée en polonais l’an dernier et traduite intégralement sur le site anglophone lifesitenews.com en février, où il est toujours accessible en première page sous le titre « Avec le pape contre l’homo-hérésie ». Le Courrier de Rome en a publié de longs extraits.
Homo-hérésie ? Le mot me semble bien choisi : il s’agit d’une déviance par rapport à un enseignement fondamental de l’Eglise sur la nature humaine et sur la manière dont l’homme fut créé à l’image et à la ressemblance de Dieu. C’est bien un faux dogme qui s’est installé, assorti d’un blasphème punissable par le « bras séculier » : naguère, c’est l’activité homosexuelle qui était considérée comme déviante et éventuellement passible de sanctions, aujourd’hui « l’homophobie » est l’objet d’un opprobre si possible plus grand encore et elle est devenue à la fois socialement inacceptable et pénalement réprimée dans de nombreux pays.
Le P. Oko répertorie de nombreux prélats qui ont été écartés pour cause de pédophilie ou d’éphébophilie homosexuelle, ainsi que d’autres qui ont « couvert » ces activités de la part du clergé dont ils avaient la responsabilité. Mais plus encore, il pointe les difficultés et les empêchements à l’action qui ont assuré une forte impunité aux coupables d’abus de jeunes dans certains pays et dans certaines congrégations, explicables seulement, selon lui, par l’existence, non seulement d’un lobby mais d’une « homoclique » ou d’une « homomafia ». Et de citer l’étonnement de l’actuel ministre de la Justice polonais devant les obstacles mis aux poursuites contre des prêtres soupçonnés d’abus dans le diocèse de Plock.
Avec beaucoup de compassion, le P. Oko note combien il est difficile pour un homme homosexuel de vivre chastement, et combien grande est la tentation pour eux de se « cacher » dans la vocation de la prêtrise, où pourtant leur liberté, une fois achevées les études, va les exposer à des tentations de passage à l’acte plus fortes encore. La peur d’être découverts les porte alors à se rechercher et à se protéger mutuellement, affirme le P. Oko, qui a eu affaire à des victimes de prélats de ce type, et qui s’est trouvé face à « un mur infranchissable » lorsqu’il s’est agi de faire reconnaître l’abus.
La décision de Benoît XVI de refuser l’accès à la prêtrise et même aux séminaires aux hommes ayant des tendances homosexuelles montre qu’il a pris la mesure du problème, et la résistance à ses décisions – le P. Oko cite des jésuites américains – montre la force du réseau homosexuel.
Que le pape François ait décidé de l’appeler par son nom est intéressant. Et montre que sa réforme de la curie ne se veut pas seulement administrative.
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