13 septembre, 2011

Idéologie du genre : Luc Chatel persiste

Plusieurs personnes qui se sont émues auprès du ministre de l’Education nationale du contenu de différents manuels de SVT de 1e conformes aux programmes rénovés de cette rentrée scolaire ont reçu une réponse de la part du chef de cabinet de Luc Chatel, Jonathan Derai, publiée en fac-similé par le Salon beige. On les renvoie aux pelotes. Il n’y a rien à voir, le ministre n’a rien à dire, il n’est responsable de rien. D’ailleurs la « théorie du genre » n’est pas dans les programmes de l’Education nationale. L’émotion des parents ne repose donc sur rien.
Alors, sujet clos ? On a eu tort de se laisser inquiéter par quelques ringards increvables ? Les « sciences de la vie et de la terre » ne sont-elles pas un vecteur de propagande idéologique ?

Voici ce qui est écrit au nom du ministre – étant entendu que Luc Chatel, cela va de soi, « a pris connaissance » des interrogations et des inquiétudes des parents et les a examinées « avec une grande attention ».
« La théorie du genre n’apparaît pas dans le texte des programmes de SVT. Le programme est centré sur des phénomènes biologiques. Il étudie le déterminisme génétique du sexe et la manière dont on passe, au cours du développement, de la vie embryonnaire à l’adolescence.
« Par ailleurs, concernant les manuels scolaires, il faut distinguer soigneusement les programmes d’enseignement, qui ont une valeur réglementaire et officielle, des manuels scolaires dont les contenus relèvent de la seule responsabilité des éditeurs. La plupart des critiques exprimées s’appuient plus sur la libre interprétation proposée par les manuels que sur le réel contenu du programme. »
Bref, l’Education nationale n’y est pour rien, les éditeurs scolaires – tous les éditeurs scolaires, sans exception – ont interprété des programmes tout ce qu’il y a de plus neutre à leur sauce idéologique, exactement la même partout, et le ministre estime que c’est très bien comme cela.

Hélas, la plupart des pétitions et réactions en circulation contre les manuels scandaleux qui épousent de fait les thèses de la théorie du genre, sans la nommer, c’est vrai, n’ont pas souligné ces deux aspects essentiels : d’une part, ceux qui protestaient ont limité leur démarche en ne signalant que les manuels de certains éditeurs, sans même s’apercevoir que le programme et son « interprétation » massive et univoque concernaient l’ensemble des manuels pour toutes les séries du bac général ; d’autre part, ils n’ont pas pris la peine de mettre en évidence la conformité de ces manuels au programme qui dit ce qu’il dit, clairement.

Le titre du thème à étudier, tel que le présente le programme paru au Bulletin officiel de l’Education nationale, est bien « Devenir homme ou femme ». Les « compétences attendues » sont détaillées ainsi :

« Différencier, à partir de la confrontation de données biologiques et de représentations sociales, ce qui relève :
– de l’identité sexuelle, des rôles en tant qu’individus sexués et de leurs stéréotypes dans la société, qui relèvent de l’espace social ;
– de l’orientation sexuelle qui relève de l’intimité des personnes. »
C’est tout le vocabulaire de la théorie du genre, tout ce qui la structure aussi.

Et il faut être absurdement naïf pour croire que les éditeurs scolaires n’en ont pas vérifié le sens auprès du ministère avant de se lancer dans de coûteuses rédactions et impressions, d’autant qu’ils en font tous la même interprétation. Il n’y a aucune place ici ne serait-ce que pour un éloge de l’hétérosexualité, et encore moins pour le fait de la présenter comme normale.

Pour enfoncer le clou, le « projet » qui présente le contenu du programme – cela fait partie de l’ensemble publié au BOEN – précise :
« Hormis quelques rares régions du cerveau (hypothalamus), les différences anatomiques et physiologiques dues à l’influence des hormones sexuelles entre les cerveaux masculin et féminin ne sont pas plus importantes que les différences entre individus de même sexe. »
Exit – en réalité – la complémentarité des sexes fondée précisément sur la différence de manière d’être dans toutes ses dimensions.

La réponse du chef de cabinet apparaît ainsi comme retorse, mensongère, méprisante. Jonathan Derai prend d’ailleurs le soin de préciser que « lors de leur élaboration, ces programmes ont fait l’objet d’une consultation nationale et ont été présentés au Conseil supérieur de l’éducation ».

Alors, si tout le monde est d’accord, pourquoi pas vous ?

La vérité, c’est que ceux qui ont mené la juste bataille contre les manuels du scandale ont vu leur action partiellement privée de son effet par les erreurs de départ que je signale plus haut, mais aussi par des décennies d’inaction. Cela fait belle lurette que les programmes font la part belle au respect de l’« identité de genre » à travers la dénonciation des « stéréotypes » et l’obligation de mettre en évidence la légitimité et le devoir de respect vis-à-vis de « l’orientation sexuelle ».

Et cela fait aussi des années que, dans une démarche « transversale » qui englobe bien des matières et plus spécialement les SVT, l’école enseigne la contraception et le refus de l’enfant ainsi que la liberté sexuelle posée en principe. C’est le cas, de manière sans doute inouïe à ce jour, pour la contraception dans le programme de SVT de 1e, cette année. Il me semble qu’il n’y a pas eu de protestations contre cela.

Quand les parents se réveilleront-ils vraiment ?

Ou sont-ils, trop nombreux, complices ?

Article paru dans Présent le mardi 13 septembre 2011.

leblogdejeannesmits

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