15 janvier, 2011

Chine : bataille judiciaire contre la politique de l'enfant unique

Yang Zhizhu, 44 ans, est professeur assistant de droit à l'université des Sciences politiques à Pékin. Pardon – il était… Car cet heureux père de deux enfants a contrevenu à la loi de l'enfant unique. Ni lui, ni sa femme ne satisfaisait aux critères pour bénéficier d'une exception : être tous les deux eux-mêmes enfants uniques, vivre dans une zone rurale ou reculée et avoir pour premier enfant une fille, avoir un premier enfant handicapé.

La naissance de la petite Yang Ruonan, le 21 décembre 2009, petite sœur de Ruoyl, 4 ans, était donc une naissance clandestine. Quatre mois plus tard, les autorités de Pékin allaient découvrir l'arrivée du bébé. Et prendre des mesures, à commencer dès le mois d'avril 2010 par le licenciement du professeur qui refusait de payer l'amende prévue par un règlement pris le jour même. (A l'heure qu'il est, il est sans emploi et touche 15 dollars par mois d'aide sociale). Sa femme ne travaille pas. Qu'importe : en septembre, il reçut notification d'une amende augmentée à 240.642 yuan (36.300 dollars) pour « naissance illégale d'un deuxième enfant ».

Ce n'est pas rien mais ce n'est pas tout. Classée « illégale », la petite Ruonan n'obtiendra pas son inscription sur les registres de Pékin (« registre des foyers » donnant accès aux services sociaux pékinois) indispensable pour pouvoir aller à l'école, trouver un emploi et même se marier dans cette ville.

Au fait, ça ferait quoi, ici en France, si l'on piétinait ainsi le « droit du sang » (jus sanguinis) ? Essayer de toucher seulement au « droit du sol » (jus soli), et vous auriez déjà une petite idée. Mais la Chine c'est loin, n'est-ce pas…

L'amende infligée à Yang et à son foyer a été définie par rapport à ses revenus, et n'est pas présentée exactement comme une peine mais comme le remboursement des sommes publiques qui seront dépensées pour la fillette en termes d'assurance maladie et de scolarisation, signale Hilary White de LifeSite. Elle a été fixée dans son cas à 9 fois le revenu urbain moyen.

Yang Zhizhu et sa famille auraient pu contourner la loi en s'installant dans une zone rurale pour avoir leur bébé, mais de cela, il n'était pas question : il n'y a rien de « honteux » à avoir un second enfant, assurait Yang au mois d'avril.

En fait, ils n'avaient pas spécialement prévu d'avoir un deuxième bébé, ils étaient ravis de leur première petite fille et ne cherchaient pas à avoir un garçon, mais à 38 ans, Yang Chen s'est trouvée enceinte de manière imprévue. La Chine est la Chine… et donc elle hésita à garder son bébé. Mais Zhizhu était sûr de le vouloir : « Il aime les enfants et pense qu'il est mieux pour eux de grandir avec des enfants », racontait Chen – et puis la grande sœur était ravie à l'idée de l'arrivée de ce nouveau bébé. C'est ce qui a décidé ses parents à « avoir » leur deuxième enfant.

Et maintenant, Zang Zhizhu a décidé d'engager une procédure contre l'Etat communiste contre la règle de l'enfant unique, et aussi contre le mode de calcul de l'amende qui lui est infligée. Il soutient que si cette politique a conduit à des « recommandations » en ce sens, aucune loi ne l'impose formellement. Il ne s'attend pas à gagner mais veut éveiller la conscience publique pour aboutir, un jour, à la modification ou à l'abrogation des mesures qui limitent de manière aussi drastique le nombre des enfants. Dans le même temps (la Chine est la Chine !) il n'en conteste pas le principe en soi, estimant qu'il répond aux « conditions » du pays. Mais il fait tout de même référence à l'affolant vieillissement de la population.


Chinadaily.com rapportait en avril dernier ce commentaire d'un expert en affaires socialies, s'exprimant sous le couvert de l'anonymat :


« La Commission nationale de la population et du planning familial en Chine, qui est un ministère au niveau national, emploie quelque 508.713 fonctionnaires à travers le pays, d'après des chiffres publiés en 2005. Si la politique de l'enfant unique est révoquée, la commission tout entière n'aura plus d'utilité, il y aura donc une importante résistance institutionnelle contre tout propos de changer la politique. »


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